PEUGEOT








Peinture et carrosserie : 100 ans de progrès

NOS FOURNISSEURS
SOCIETE FRANCAISE DUCO





La société DUCO a été créée en France pour diffuser les peinture à base de NITRO-CELLULOSE inventées aux USA par DUPONT de NEMOURS à la fin de la guerre de 1914-1918. Cette technique doit permettre de peindre un véhicule en trois jours au lieu de trois semaines jusqu'alors !

La petite société WELLIN-HIGGENS, licenciée de Dupont, est fondée en 1925 à Paris. En 1927, la société LA DYNAMITE rachète le brevet Dupont et réalise la fusion de Wellin-Higgens avec Robialac pour donner naissance à la future DUCO (DUpont de Nemours et CO). La société s'installe à à St Ouens puis à Stain, après un grave incendie. L'usine fermera ses portes le 30 novembre 1989.

Les anciens de la société, Mrs ABATTI, DUFLOS et LEBAU ont voulu rendre hommage aux milliers de collaborateurs qui ont contribué à cette épopée en faisant de leur société un des fleurons de la peinture française. Ils ont rassemblé de nombreux témoignages pour écrire ce livre, dont vous trouverez le texte ci dessous, grâce à l'aimable autorisation de Mr Duflos.
Sigle DUCO 1 Sigle DUCO
Livre  DUCO, notre bel amour


AVANT - PROPOS

A Maurice-Xavier ABATTI

qui a été à l'initiative de ce livre.

 

 S'il peut enfin voir le jour, c'est grâce à l'obstination de tous ceux qui ont contribué à son achèvement en nous fournissant leurs précieux souvenirs. Vous les retrouverez au fil de ce récit.

 Nous dédions aussi ce livre aux milliers de collaborateurs qui, au cours de cette épopée, ont manifesté leur esprit "DUCO". Nombreux sont ceux qui ont disparu et qui étaient fiers d'avoir fait de notre Société un des fleurons de la peinture française.

 Pour les autres, nous espérons que sa lecture leur rappellera des souvenirs, bons ou moins bons, nostalgiques mais sans amertume.

  C'était « DUCO ».

  Enfin, un grand merci à R.DUFLOS et J.F LEBAU qui en ont assuré la cohésion et la mise en page.

  La rédaction.


  

PREAMBULE

DUCO notre bel amour...!

 

Une affaire industrielle c'est une civilisation: ça naît, ça grandit, ça prospère, ça vieillit et ça meurt ! Comme l'Homme, en somme...

Son existence est une succession d'efforts, de peines, de chagrins, de fureurs même, mais aussi de grands moments de rires, de satisfactions et de souvenirs heureux.

Chez ceux qui la composent, chacun -depuis les ancêtres aux attitudes parfois hiérarchiques, jusqu'aux plus récents impétrants encore empreints de leur enthousiasme- a contribué à faire marcher la machine. Sans eux, la Vie aurait cessé depuis longtemps.

Comme elle a été belle notre Société, et combien nous l'avons tous aimée! Aussi n'est-il pas possible que la dalle froide des oubliettes se referme définitivement sur elle sans qu'au moins quelques pages pieusement conservées ne puissent un jour lui permettre de resurgir du passé à l'appel de quelqu'ancien mélancolique et vieillissant, qui voudrait y retrouver sa jeunesse aux sons mineurs de la Valse triste de Sibelius écoutée en sourdine...

Hélas! En écrire l'histoire est un quasi-dilemme. Comment faire pour que, quel que soit le lecteur, elle soit jugée comme la Vraie?

Sa vie dans la Société, chacun l'a vécue selon son tempérament propre, et il est probable que si l'on demandait à tous ceux qui y ont appartenu d'exposer comment ils la voient, il y aurait des différences et de nombreuses contradictions. Quel est le Juste alors, qui serait capable d'en faire la synthèse objective?

Une monographie chronologique serait vite insipide. Alors, il faudra égayer le texte de quelques anecdotes chaque fois que cela sera possible et ne pas avoir peur de le pimenter de quelque jugement personnel en cherchant à ce qu'aucun ami ne s'en offusque.

 

Nous pourrons, plus ou moins arbitrairement, diviser cet ouvrage en cinq parties.

- Les temps anciens: de l'origine à la Libération (1945-1947)

- La période bleue: celle de M. DUCHE et de la Centrale de Dynamite jusqu'en 1958.

- La période noire: celle de M. ETIENNE, avec l'arrivée de NOBEL-BOZEL (1959-69)

- La période rouge: celle de M. MAILLET, avec NOBEL, ROUSSEL, HOECHST (1970-79)

- La dernière a la couleur d'une nébuleuse après l'explosion avec les CHARBONNAGES DE FRANCE puis NOBEL-SUEDE (1980-1989/90)

 

Place aux souvenirs du coin du feu !

et maintenant peut commencer

l'Histoire de DUCO la BELLE !

 

 

LES TEMPS ANCIENS

De l'origine à la Libération (1945-1947)

 


L'ORIGINE.

Tout a commencé par une décision: celle d'exploiter une idée nouvelle jaillie du cerveau génial d'un chimiste américain appartenant à la Société "l DUPONT DE NEMOURS ".

Il s'agissait de mettre à la disposition des « carrossiers » des « laques-émails » constituées à partir de nitro-cellulose, et qui devraient permettre de peindre une automobile en trois jours au lieu des trois semaines nécessaires jusque là avec les « peintures-grasses » !

C'est ainsi qu'une petite société: WELLIN-HIGGINS, licenciée de Dupont est fondée en France en 1925. Les bureaux sont installés 28, Avenue de l'Opéra, et sa mission est de commercialiser ces nouveaux produits révolutionnaires. En 1927, la « Centrale de Dynamite » rachète la licence du brevet à Dupont et réalise la Fusion de Wellin-Higgins avec Robbialac, pour donner naissance à la future Société DUCO : DUpont de Nemours et CO. Au fameux sigle dans son ovale rouge, dont l'usine s'installe à Saint-Ouen. Ravagée par un incendie en 1930, il lui faut trouver un site plus en mesure d'accueillir la fabrication de peintures à base de matières premières aussi dangereuses que la nitro-cellulose.

Stain en construction 1927 Usine DUCO Stain

Le bâtiment de Stains en construction en 1927

Le bâtiment rénové pour l'installation de la Société

STAINS

Il existait sur cette commune ce que nous appellerions aujourd'hui une « Zone industrielle », dans le quartier du Moulin Neuf, bordée par un ruisselet: le Rouillon, à la limite du futur parc départemental de la Courneuve. A la fin du XIXème siècle, plusieurs usines s'y étaient installées. La plus ancienne -Papeterie du journal parisien « La Lanterne »- fut inaugurée le 26 mai 1889.

Elle sera dissoute en 1896, mais avec d'autres propriétaires, son activité continuera jusqu'en 1969, date de la destruction des bâtiments, dans le domaine du papier-tabac.

Deux autres entreprises avaient une direction commune, c'était la « Compagnie Française de Celluloïd » (1888-89) d'une part, et la « Compagnie Générale de Chromolithie » d'autre part, à l'emplacement de la future usine Hoechst, et dont il ne subsiste aujourd'hui que la grande cheminée de briques portant une date: 1907. La « Celluloïd » qui employait 250 personnes, connut deux terribles incendies: 18 juin 1892 et le 17 avril 1897 dans la soirée, qui mirent un frein à ses dangereuses activités, la fabrication des célèbres « baigneurs » et d'articles comme les baleines de corsets, de cols et plastrons de chemises, ou de cornettes de religieuses. (On en retrouvera quelques caisses après la guerre, dans les années 1950, oubliées dans de vieux bâtiments où personne n'allait jamais !).

Enfin, le long du « Chemin de Romaincourt » la Société Lemaire et Co. Avait installé une mégisserie. Elle était exactement à l'emplacement de la future entrée de DUCO: les deux peupliers du 43 rue Victor Renelle.

Il convient de dire ici un mot de V. RENELLE qui était ingénieur à la Société Française DUCO. Arrêté par les Allemands, il fut emprisonné, puis fusillé à Châteaubriand le 22 octobre 1941 pour avoir refusé de trahir son pays. Le 18 juillet 1946, la municipalité décidait de donner son nom au Chemin de Romaincourt. Son portrait, qui fut longtemps accroché dans son ancien laboratoire, ainsi que les plaques commémoratives rappelant le souvenir des membres du personnel morts pour la France, ont été remis au Maire de Stains à l'abandon de l'usine en 1989.

 

DÉMARRAGE DE L'USINE

 

DUCO premier atelier conditionnement Duco cabine peinture

Le premier atelier de conditionnement

La première cabine de peinture

A cette époque, les teintes utilisées dans l'automobile étaient peu nombreuses. HENRY FORD avait" annoncé la couleur" à ce sujet. : « Moi, je fournis au client toutes les teintes qu'il me demande, pourvu que ce soit du ... noir ! »

Il ne put tenir longtemps dans cette exclusive. La concurrence apporta bientôt la multiplicité des coloris et tout le monde fut bien obligé de suivre, Ford le premier. Et puis, d'autres" résines" apparurent. La grande « Industrie des Peintures » allait prendre son essor. Il n'était plus possible .de rester au stade artisanal.

 Au début des années 30, un solide état-major se constitua avec MM DUCHE, CORVAZIER, FERRAND, DUBIEN, aidés de MM PERETTI, MICHEL et VASSEUR, qui réussit à intéresser M. CORDIER, Président du groupe « Centrale de Dynamite », et M. JECQUIER, Président du « Crédit Commercial de France » qui apporta son appui financier. C'est ainsi que naquit la « Société DUCO », dont le siège s'installa au 67 boulevard Haussmann et qui devint fabriquant de peinture à part entière.

La première campagne publicitaire fut menée sur le thème: « DUCO, premier émail à froid ». Une affichette représentait un petit chinois qui montait à un mât de cocagne au fur et à mesure qu'il le peignait et s'exclamait ravi: « Déjà sec! ». Ce slogan, rappelant l'histoire du fou, de son échelle et du pinceau collé au mur auquel on lui conseille de s'accrocher n'eut pas un franc succès. En revanche, dans l'automobile, « DUCO CUIRASSE L'AUTO » n'eut pas à rougir de son affirmation.

 

Mais avec les nouvelles résines, il y avait maintenant d'autres clientèles à prospecter. Tout ce qui pouvait se peindre fut systématiquement recherché car, disait-on alors: « Tout se peint bien avec DUCO ». Ce fut le cas des constructeurs automobiles bien sûr, mais aussi de la marine, des chemins de fer, de l'aviation, du métro, des bus, des cars et des camions. Puis bientôt de l'Industrie, du Bâtiment, et même du Grand Public.

Hélas, la guerre arriva qui vit l'usine s'installer en zone libre, à Castres, sous la houlette de M. LAUDAT, et P. BERTEAUX aidés de loin par M. CORVAZIER demeuré à Stains où cette « Société américaine » fut mise sous séquestre allemand et contrainte, avec le personnel resté en place, de produire les peintures exigées par l'occupant.

Il faut dire que pendant cette période, la qualité eut beaucoup à souffrir! Mauvaises matières premières disait-on, ou mauvaise volonté, plus souvent les deux à la fois.

Puis vint la Libération!! La grande époque allait commencer par un bouleversement. En 1947, la loi « anti-trust » est promulguée aux U.S.A, obligeant Dupont de Nemours à se séparer de toutes ses filiales étrangères: Impérial Chemical Industries (ICI) en Grande-Bretagne, Montecatini en Italie, Wiederholt en Allemagne (de l'Ouest) et DUCO en France, les forçant à devenir nationales et indépendantes.

C'est ainsi que DUCO devint la«  Société Française DUCO »

 

LA PERIODE BLEUE

(1948-1958)


Pour cette période qu'il a bien connue, nous laisserons la parole à notre ami Maurice-Xavier ABBATI, qui nous a quittés en juillet 1992, et qui était à l'origine de l'idée d'écrire un petit ouvrage en souvenir de la Société DUCO.
C'est à sa mémoire que nous le dédions en regrettant qu'il n'ait pu nous accompagner jusqu'à la fin de sa rédaction.

Entré à la Société immédiatement après la guerre, MX ABBATI nous fait le portrait savoureux des « Patrons » de l'époque. Outre M JECQUIER, Président du C.C.F, et M CORDIER Président de la « Centrale de Dynamite » dont le mérite, et pas des moindres, avait été d'éliminer Henri CLEMENCEAU, le frère du « Tigre » pour obtenir son poste! Voici quels étaient les grandes figures de la Direction.

- DUCHÉ: Centralien. PDG d'Isorel et de DUCO. Athée total. Grand bourgeois et grosse fortune. Allure et qualités du Grand Seigneur. Capable de prendre les décisions les plus dures mais aussi d'accorder le pardon au plus coupable.

- FERRAND : agro (« L'Agro mène à tout, à condition d'en sortir » avait-il l'habitude de dire). Catholique très pratiquant. Cinq enfants. Grand bourgeois, lui, (et non pas grand seigneur comme DUCHÉ... il était un de ces « économes » !...) Il avait cependant une faiblesse, sa « folie », comme il disait: le château moyenâgeux de Folin, dans l'Yonne, qui lui coûtait les yeux de la tête. Directeur général chez DUCO (Finances, commercial, administration), il souffrait de frustration: celle de ne pas être le Président de DUCO.

- CORVAZIER : Ingénieur chimiste de l'Ecole de Nancy (« la meilleure de toutes » disait-il, en même temps que ses ingénieurs), Directeur général Recherche, technique, production. Le torchon brûlait souvent entre lui et FERRAND. Mais n'est-ce pas tellement classique que j'aurais pu me passer de le souligner? Très compétent, mais d'un autoritarisme forcené. Je crois cependant, très estimé de tous ses cadres.


duco stain1
Duco Corvazier Caillaux
Le bâtiment
A droite : Mlle Caillaux et Mr Corvazier
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Duco stains staff

Le staff autour de la Renault
Un banquet

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duco satins stockLe stockage
Collection personnelle et familiale de Mr R.C.


- MICHEL: Ingénieur chimiste (mais pas de Nancy) surpris par la guerre pendant qu'il était en Algérie, y est resté, et a monté sur l'ordre de DUCHE, une usine à Hussein-Dey, près d'Alger et qui a magnifiquement marché. Resté longtemps là-bas après l'Armistice, DUCHE lui demande de revenir pour s'occuper des « Constructeurs de matériel des Chemins de Fers » (après la mort de son responsable M. RONCORONI), mais aussi pour superviser l'affaire "Guittet" qu'on venait d'acheter. Homme de grand bon sens, il appuya toujours l'équipe constituée par C. GUITTET à Montigny et la soutint auprès de la Direction de DUCO. Il était direct, brutal même diront certains, mais il savait faire gagner de l'argent ! Petit défaut: grand buveur devant l'éternel. Aimait, paraît-il aussi les jolies femmes. (Mais Bon Dieu! Pourquoi dis-je cela ? Qui chez DUCO ne les aimait pas...)

- DUBIEN : Ingénieur chimiste surpris par la guerre aux USA au cours d'un voyage d'études qu'il faisait à la Dupont de Nemours. Y était resté. Jusqu'à ce que DUCHE le rappelle en 1956, pour remplacer M. CORVAZIER qui avait pris sa retraite. Très chic type (moi, je l'aimais bien et il me le rendait), manquant un peu d'autorité et un peu brouillon, ce qui contrastait avec son prédécesseur, bien sûr. En réunion passait son temps à brouillonner des pages de notes, hochant la tête de temps en temps en disant: « Ah, bon, bien! ». Un peu snob, je me souviens de l'avoir entendu dire un jour à une réunion à laquelle je participais: « il nous faudra faire plus de... plus de... voyons, comment dites-vous çà en Français? Ah oui, plus d'efforts... » perte de mémoire due à son immense admiration qu'il avait pour la Dupont et la langue anglaise qui, probablement, lui faisait oublier sa langue maternelle. Il avait quelques ennemis mais peu nombreux. Peut-être parce que, comme disait Churchill: « Le nombre et la violence de ses ennemis dépendent de sa propre valeur personnelle ». Ce n'était peut-être pas le super-As qu'on aurait désiré, mais en tout cas, tout le monde l'aimait bien, et quoique non technicien, je crois pouvoir assurer qu'il n'a jamais démérité.

- VASSEUR : Self-made man. Doté d'une volonté d'acier pour arriver. Entré à la Démonstration, c'est CORVAZIER qui l'en fit sortir pour prendre le poste « en intérim » de remplaçant du Directeur commercial qui venait de partir, en 1932. Petit à petit -resté définitivement au poste, et nommé Directeur commercial en titre par DUCHE à la Libération- il fut amené à contrer de plus en plus Mr. CORVAZIER dont les méthodes étaient plus ou moins opposées aux siennes. Ce qui faisait dire en riant, à ce dernier: « J'ai élevé une couleuvrrrrrrre dans mon serrrrrrrail!... » Travailleur acharné et doté d'un solide bon sens, mais hélas, un peu trop petit garçon devant Mr. DUCHE... Enfin, anxieux perpétuel, il s'usa la santé à se faire du mauvais sang.

Voilà donc les "grands" de DUCO pendant cette période bleue. Bien sûr il y avait les moins grands à qui DUCO doit aussi sa réussite. Comment les citer tous? Comment ne pas risquer d'en oublier, ne serait-ce qu'un seul et qui, pourtant, aurait lui aussi, bien mérité de la Société?

Espérons en rencontrer quelques-uns dans les anecdotes qui émailleront la suite de ce récit.


DES SOUVENIRS LOINTAINS, LOINTAINS...
 

S'il est exact que « les peuples heureux n'ont pas d'histoire », alors comment réussir à parler de DUCO de l'immédiat-après-guerre? Opposons donc à cette citation, celle qui déclare « qu'être heureux est un verbe qui se conjugue au passé avec le souvenir, au futur avec l'espérance, mais qui n'a pas de présent ». Cela nous permettra d'excuser un éventuel manque d'objectivité de nos propos. Pendant cette "période bleue", DUCO était organisé selon la bonne vieille méthode classique qui convenait parfaitement aux activités de l'époque: un Président Directeur Général et deux Directeurs Généraux adjoints. L'un pour la Production et le Technique, l'autre pour le Commercial, l'Administration et la Finance.

Généralement quand un nouvel arrivant entrait chez DUCO, il lui fallait effectuer un stage dans les divers services de la société. Celui-ci était plus ou moins long, selon l'importance du poste que l'impétrant allait occuper. En traitant aujourd'hui de ces stages, nous nous remettrons en mémoire l'organigramme de DUCO à cette époque.

La plupart du temps, c'était Monsieur JEANBERT du « Service Liaison-Production » qui était chargé de suivre le stagiaire durant tout son périple. Ce JEANBERT était un chic type qui ne manquait jamais de raconter à tous ceux qu'il rencontrait pour la première fois, l'aventure qui lui était arrivée pendant la guerre: matelot à bord d'un sous-marin, son bâtiment avait été torpillé alors que, coupole ouverte, il naviguait en surface. Se trouvant sur le pont avec d'autres camarades, JEANBERT avait été aspiré par l'immense cône tourbillonnant qui l'entraînait irrésistiblement vers le fond. Chaque fois, avec les mêmes tremblements dans la voix, il décrivait à son interlocuteur son inéluctable descente aux abîmes, ses yeux horrifiés apercevant, tout en haut, le ciel bleu qui s'éloignait, s'éloignait... jusqu'à la miraculeuse seconde où il ne comprendrait jamais par quel étrange phénomène de physique, il avait été absorbé soudain par la spirale montante et éjecté à dix mètres dans les airs, pour retomber dans l'océan et se retrouver, nageant avec quelques rares survivants... Tel Virgile et son « Apparent rari nantes in gurgite vasto... » ( De rares naufragés flottant sur le vaste abime)

Donc, au cours de ces stages, on passait d'abord dans les différents services de « l'Usine », dirigée par Monsieur STEIN, Ingénieur en Chef, un solide Bourguignon, truculent, bon vivant, mais ne plaisant pas à tout le monde du fait de la rudesse qu'il apportait à sa manière de commander.

Puis on allait voir comment fonctionnaient la « Production et l'Ordonnancement », dirigés par Monsieur ILLIG et son adjoint, Monsieur ETAIX (dit « Le Perfectionniste », tant il poussait loin les études qui lui étaient confiées). Parfois, on faisait un petit tour au « siège », 67 boulevard Haussmann à Paris, pour s'imprégner des méthodes comptables de l'excellent Monsieur PERETTI, secondé par Monsieur LECOMTE.

On rendait ensuite une visite aux « Achats », menés de main de maître par Monsieur LABERGERIE (un fameux « pète-sec » mais qu'on excusait toujours, du fait de son intégrité à toute épreuve, qualité assez rare, chez les acheteurs des grandes sociétés). Monsieur VERDON, très scrupuleux lui aussi, lui servait d'adjoint. Ils avaient avec eux, Monsieur CARNEGLIA, un ancien de Robbialac et Mademoiselle BRUNET - future Madame RABY - qui se chargeaient plus particulièrement du « Magasin Matières Premières ».

Le chef du personnel M. BRANQUE, puis son successeur M. DESHAIS avec leur adjoint M. ATHANEE, essayaient de vous inculquer les meilleurs procédés permettant de posséder la main de fer dans le gant de velours.

Enfin, Monsieur GAIGNARD « Saint-Vincent de Paul » secondé par Monsieur LAUDAT qui avait mené DUCO à Castres pendant son repliement en zone libre, puis par Monsieur STERN (l'inépuisable raconteur d'histoires salaces), s'efforçaient de vous faire comprendre les trucs qui permettraient de livrer sans drame, huit jours après, une commande que le client avait demandée pour la veille mais qui ne se trouvait jamais au bon moment dans ce fameux service « Stocks expéditions », qu'on appelait, je ne sais pourquoi, « La Réserve »... Peut-être parce qu'on était toujours très "réservé" dans ses réponses lorsqu'on vous demandait une date précise de livraison...

On passait évidemment aussi dans les différents services Commerciaux, mais c'est surtout dans les nombreux services techniques que les stages étaient les plus longs et les plus intéressants.

A cette époque, ils étaient placés sous la responsabilité de Mademoiselle M. CAILLAUX. Faisant fonction de Directeur. Il y avait quatre laboratoires de « Mise au point ».

- Constructeurs Automobiles et Carrosserie : avec P. BERTEAUX et son adjoint A. NEIRYNCK

- Bois et Electroménager avec HELLER assisté de KIRIANENKO et BOYER

- Isorel - Armée - Produits spéciaux avec M. DEBLACHE et ses adjointes Mmes. P. CHARRON et J. BROSSIER.

- Matériel agricole - et SNCF avec H. ALBA et son adjoint C. HOVELAQUE Conjointement, cinq laboratoires de « services » les assistaient.

Le laboratoire « Recherches appliquées » avec SCHREIBER

 Le laboratoire « Résines » avec A. CAHN - Adjoint J. BUJON

Le laboratoire "Colorimétrie" avec E. SAFFRE (Considéré comme une sommité dans la Profession, il sera à l'origine des études du « climat par la couleur »). Adjointe Mlle J. SPINAT (Cette fraîche jeune fille fera son chemin royal chez DUCO). Grâce à son extrême compétence et à son tempérament de « chèvre Corse ». Il n'y a pas de rose sans épines, dit-on, en langue d'oc « Spina » signifie pieu ou épine! Elle émigrera bientôt en territoire de langue « d'oïl », puisqu'elle deviendra Mme. JONCKHEERE. Mais çà ne l'empêchera pas de conserver sa fière devise, pour son plus grand bien et celui de ses amis: « qui s'y frotte s'y pique »!, assistés de Mlle H. JANTON (future Mme. CHAROFF)

Le laboratoire « Analyses-Contrôles Matières Premières » avec M. PERRIER Adjointes Mlle J. VOISIN et Mme. DIENER pour les « Contrôles » et Mme M DELPECH-CLEMENT pour les « Analyses ».

Enfin un laboratoire "Contrôles des Produits finis" avec R. SOINARD. Il sera terrassé par une crise cardiaque en 1970 au carrefour du Globe alors qu'il se rendait comme presque chaque dimanche en fin de matinée à l'usine pour vérifier que tout allait bien et surtout assurer le fonctionnement en continu du matériel qui ne devait pas s'arrêter, et A. BURGLE.

N'oublions pas le séjour obligé à la "Démonstration" qui, avant d'être entre les mains de Monsieur BESANCON, puis de Messieurs GEYSKENS et LEBAU, était dirigée par Monsieur THEURILLAT, le créateur de magiques poudres à bois. C'était lui qui était chargé de vous instruire sur les nombreuses techniques d'application des peintures et vernis. Quand vous en sortiez, vous aviez la conviction qu'en fait, tout ne se réduisait qu'à une seule opération: le ponçage. Car pendant tout votre séjour à la Démonstration, vous ponciez, ponciez, ponciez...

Au passage, on ne manquait pas de vous faire admirer la maîtrise de Madame MENEGAUX dans l'art de commander le personnel d'embidonnage. On vous emmenait également voir Madame MOREAU chargée de la « Cantine ». Puis Madame PERONNE, l'Assistante sociale, et la Doctoresse ESTEVE chargée du Service Médical.

Je ne me rappelle pas si l'on visitait ou non le Standard téléphonique, mais je tiens à souligner ici que Madame LANGLOIS, et plus tard Madame MOUGENET, ont magnifiquement servi les intérêts de DUCO grâce à leur dynamisme et à leur gentillesse reconnue par toute la clientèle.

Il y avait un service par contre, devant lequel on vous faisait passer très rapidement: c'était le « Garage et Matériel » où Monsieur DURFORT (le papa de Madame GEYSKENS) et son adjoint Monsieur CHOPPICK, exerçaient leur grand talent. Je crois que c'était pour ne pas faire naître de vains espoirs aux futurs cadres: les voitures de fonction, il valait mieux ne pas trop y compter...

Oh, comme j'ai été heureux de me remémorer tous ces noms dont la plupart sont aujourd'hui inconnus ou oubliés de beaucoup de nos amis actuels! Pourtant, ils sont nombreux, ceux que j'ai dû laisser de côté ou que je n'ai pas encore cités, notamment au commercial dont nous parlerons plus avant. En tout cas, c'est bien toute l'équipe homogène formée par l'ensemble du personnel de notre société, qui a mis celle-ci fermement sur ses rails.

Il faut avouer que celui qui entrait chez DUCO à cette époque ressentait souvent un sentiment de déception.

Pour tout le monde, Dupont de Nemours, cette Superstar américaine, ne pouvait laisser apparaître qu'ateliers automatisés dans lesquels tournaient des machines étincelantes, ronronnant en silence comme des huit cylindres en ligne, et que bureaux luxueux, tout en verre, dotés de meubles sophistiqués posés sur des tapis somptueux. Tout autour de soi, il ne pouvait y avoir que de multiples appareils miniaturisés couverts de petites lampes de toutes les couleurs et de boutons de nacre sur lesquels il suffisait d'appuyer pour faire apparaître une splendide secrétaire aux cheveux roux et en jupette plissée vous apportant sur le champ un whisky délicieusement frais, ou bien pour apercevoir sur un écran s'éclairant brusquement, le visage de votre interlocuteur vous appelant de Tokyo ou de Boston.

La réalité était tout autre: de vieux bâtiments en briques, dont les vitres encadrées d'une peinture qui s'était voulue verte dans le temps, refusaient de laisser passer la lumière tant la crasse s'y était accumulée. Des broyeurs et mélangeurs arlequinés et bruyants qui semblaient tourner carré et qui empêchaient de dormir le voisinage sur cinq cents mètres à la ronde, lorsqu'on était obligé de les faire travailler de nuit. Des appareils de cuissons vétustes et recouverts des milliers de séquelles de fabrications de résines, qui provoquaient régulièrement leur habituel début d'incendie. En 1968, lors de la mise en route de la nouvelle installation de cuisson Mademoiselle CAILLAUX en a eu les cheveux, les cils et sourcils brûlés. Le Chef d'atelier M. BOULMIER fut lui plus gravement atteint au visage. Quant aux bureaux, ceux du Commercial au moins, qui auraient dû être les plus soignés puisque destinés à recevoir la clientèle, ils consistaient en un long bâtiment de plain-pied, genre baraque de chantier. Tout en longueur, avec un couloir central ressemblant à une coursive de rafiot panaméen, desservant de chaque côté des bureaux dont la superficie plutôt restreinte et le mobilier miteux, rappelaient quelque vieux local de ministères ou la caserne du 5ème régiment de tirailleurs algériens de Maison-Carrée.

Et pourtant, tout ça fonctionnait. Le miracle provenait du moral des troupes: cadres, employés, ouvriers ou contremaîtres, tout le monde aimait bien « Papa DUCHE » et s'efforçait de faire marcher la boutique pour l'amener vers un destin qu'on prévoyait brillant. Le Papa DUCHE menait tout cela avec son bon vieux paternalisme d'antan dont personne ne se moquait alors. Quand quelqu'un s'estimait victime d'une injustice, la porte de DUCHE était ouverte; il suffisait d'aller le voir. Il était rare, même lorsqu'il s'agissait d'une faute lourde, qu'il reste insensible aux remords du coupable si celui-ci s'excusait sincèrement.

Chaque année, la veille du 11 novembre, il réunissait l'usine et faisait un petit speech devant les plaques apposées sur la façade du Commercial, en souvenir des anciens de DUCO morts pour la France. Ce sont ces plaques déposées en 1989 qui ont été remises à la Municipalité de Stains. Il y avait celle du Sous-lieutenant RONCORONI, tué en 40 (son père s'occupera ensuite des Chemins de Fer), celle du Capitaine d'aviation PÉRONNE, mort en combat aérien (DUCHE avait engagé sa veuve comme assistante sociale), celle de DIENER, Israélite mort en déportation (son épouse fut placée au service documentation), enfin celle de Victor RENELLE, Chef de la Cellule communiste de Stains, ingénieur chez DUCO, arrêté et fusillé par les Allemands à Châteaubriand, en même temps que 49 autres otages, en représailles de l'assassinat d'un officier de la Wehrmacht dans le métro, et dont le nom sera donné à la rue longeant l'usine.

Evidemment, chacun estimait bien qu'il aurait pu être mieux payé, mais bien avant qu'on ne parle de « participation », DUCHE avait imaginé de verser chaque mois au personnel un complément de salaire basé sur ce qu'il appelait « les supers bénéfices ». Leur calcul, mis en équation par PERETTI, était hélas tellement compliqué, que l'assiette en était constamment changée. Le procédé fut abandonné et compensé par une augmentation générale des salaires. Mais à l'époque, nous étions tous heureux de recevoir en fin de mois, cette petite rallonge qui avait des allures d'étrennes. Les cadres, eux, bénéficiaient de gratifications exceptionnelles de fin d'année, selon les résultats obtenus. Ces « grattes » étaient attendues comme la manne céleste.

Cette époque qui a duré jusque vers 1958, a bien été celle de la grande famille DUCO, comme aimait à nous le répéter « Papa Duché ».


EN ATTENDANT L'ICI

Ce qui m'a toujours frappé chez DUCO, c'est ce solide esprit de corps qui animait tous ses membres.

Bien sûr, par instants, les techniciens traitaient bien les commerçants d'épiciers et ceux-ci accusaient ceux-là de ne savoir fabriquer que des produits à mettre en vitrine, mais quelle est l'affaire qui n'est pas démangée de temps en temps par les mêmes grattages? Le recul des années me permet aujourd'hui d'être formel: dans notre société, peut-être ne s'aimait-on pas tout le temps mais en tout cas, on s'estimait toujours... Et, soyez persuadées qu'il ne s'agit pas ici d'un tout-le-monde-il-est-beau, tout-le-monde-il-est-gentil émanant d'un cerveau de Rousseauiste bêlant ou de celui d'un homme rendu mélancolique par le « Souvenir », dont le propre est de gommer les mauvais moments pour ne conserver que les bons. Non! A l'exception de cas sérieux -que j'aurais alors oubliés- je maintiens cette affirmation. Et je suis sûr que sur ce point, je me trouverai en accord avec l'ensemble de ceux qui me liront.

C'était notre force! Bien sûr, cela n'empêchera pas, beaucoup plus tard, certains esprits chagrins de manifester leur mécontentement à l'arrivée de quelque pièce rapportée se prétendant indispensable, et seule capable de sauver notre vieille maison. Peut-être n'avaient-ils pas entièrement tort !

Prenons l'exemple du Commercial que je connais bien -et pour cause!- et dont nous n'avons pas encore parlé jusqu'à présent: dans ce service -mené de main de maître par VASSEUR, à l'époque- il n'avait pas besoin d'antagonismes personnels pour faire marcher la boutique. Le Patron était fier de son équipe, comme il aimait à le répéter. Et s'il arrivait parfois qu'un de ses membres ressente soudain de l'animosité pour son co-équipier, il ne lui maintenait pas moins son estime, suivant en cela, la règle générale. C'était indispensable et c'est pour cela que ça marchait.

Parlons-en un peu de ce Commercial à l'époque.

A l'extérieur, nous avions les trois demi-dieux mythologiques: les agents généraux WEIL (Prénom: Macchia), CHANTIER (surnom: Pierrot-mes-sous) et BOTTEREAU (dit le Beau Gosse). Ils étaient chargés respectivement de l'Automobile, de l'Industrie et du Bâtiment.

A l'intérieur: leurs homologues: CUNISSET (le père de Jean-Pierre), BEL (dit le Taureau du Jura) et KIEFFER (que l'on dénommait Loulou la Gazette. Je ne sais pas comment il se débrouillait, mais il était toujours le premier à savoir ce qui se passait ou se disait ailleurs), héros moins mythiques mais sans lesquels tout le mécanisme aurait été bloqué.

Et comme cela se passait dans tous les autres départements de DUCO (du technique à la production, pour ne citer que ces deux principaux là) les Cadres, Ingénieurs, Laborantins, Employés, Secrétaires, Dactylos ou Ouvriers, tout cela fonctionnait à cinq sur cinq.

Ainsi, DUCO ne pouvait que prospérer rapidement. Le bon sens de DUCHÉ, le dynamisme du commercial, la compétence du technique et le dévouement absolu de tous les membres de la société, étaient les moteurs puissants de cette réussite.

Je me souviens des premières deux cents tonnes vendues dans le mois, vers 1950. Elles avaient amené DUCHÉ à offrir un vin d'honneur à toute l'usine. Comme tout le monde était heureux et fier, alors !

Les patrons nous disaient bien, de temps en temps, que « DUCO perdait de l'argent », mais c'était accompagné chaque fois, d'un tel sourire ambigu que nous nous consolions avec l'idée qu'il fallait bien que dans le groupe, il existe une société qui perde un peu d'argent pour compenser, sur le plan fiscal, les bénéfices trop importants des autres... Comme c'était commode, n'est-ce-pas, de se satisfaire...

Restons très objectifs et reconnaissons qu'à l'époque, il manquait à tous les échelons, une connaissance supérieure de la gestion moderne. Aujourd'hui, nous ne pourrions plus nous en passer, mais pourtant, dans cette décade de la "période bleue" dans laquelle nous nous trouvons encore ici, tout ne fonctionnait-il pas convenablement? Il n'en sera plus de même vingt ans plus tard. Les abus d'une gestion démesurée, mal comprise et hystériquement appliquée commenceront à asphyxier DUCO. Jusqu'à l'amener au bord du gouffre.

L'industrie était notre grande pourvoyeuse de soucis majeurs, mais elle était aussi notre fierté.

Grâce à l'excellence de notre technique et à la fougue de CHANTIER qui menait à l'abordage ses représentants et démonstrateurs, nous étions devenus les fournisseurs numéro Un de cette clientèle (ou en tout cas, un des deux premiers).

Chez les Constructeurs automobiles, grâce à WEIL, nous avions le quasi monopole des fournitures de laques chez Simca, et une très belle position chez Peugeot. Renault, lui, qui fabriquait ses propres peintures, nous laissait cependant une place enviée chez ses concessionnaires et agents (plus exactement a la SAPRAR qui en était le moteur).

Seul Citroën ne voulait pas de nous. Il était impitoyable, refusant même de nous recevoir. Tout cela, à titre de représailles contre DUCHÉ qui, un jour de colère (Citroën refusait de modifier sa chaîne pour réussir à utiliser nos produits), avait lancé au Président « Puisque c'est comme ça, je vais donner des ordres pour que dorénavant, on ne vous livre plus rien. Si vous voulez utiliser nos produits, c'est à genoux que vous viendrez me les demander... »

 Pour avoir la foi, il avait la foi, notre Papa Duché!

Mais c'est DUCO qui a été boycotté pendant près de vingt-cinq ans... A force de persévérance et grâce à M. BESANCON, nous verrons comment s'est effectué notre retour chez Citroën.

Dans le Bâtiment, nous venions de démarrer avec une courageuse formule: réussir à livrer aussi bien des grosses entreprises en direct que des petits peintres par un réseau de distributeurs. C'était une gageure et pourtant, nous nous sentions partis pour un brillant avenir.

Mais nous avions une locomotive puissante, la Carrosserie. Elle deviendra bientôt la vache à lait de DUCO. C'était sans doute une « belle laitière », mais à trop tirer sur les mamelles, on finira par épuiser la malheureuse! Hélas...

Je dois vous imposer mon moi haïssable pendant au moins deux lignes de ce texte, car je veux vous faire savoir que c'est bien VASSEUR et WEIL qui m'ont appris à travailler dans cet art qu'est la vente par agents distributeurs.

Vendre par grossistes est un métier difficile et presque une science. Et c'est peut-être bien parce que, dans la dernière décade de la vie de DUCO, on l'a trop oublié, poussant l'inconscience jusqu'à se séparer de notre ami CASCUA, le dernier vrai spécialiste en la matière, que nous avons cessé d'être, un des deux leaders de la profession.

La vente par distributeurs est la pierre d'achoppement des dirigeants d'entreprise. Foin de polytechniciens, de centraliens, d'Insead ou d'HEC! Un simple diplômé de l'école primaire de Trifouilly-les-Oies réussira s'il est accrocheur et psychologue. Oui! Surtout psychologue, cette vertu qui manque à tant de gens.

C'est de toute façon, un travail épuisant qui exige une vigilance et une fermeté doublée d'une diplomatie de tous les instants et dans lequel le facteur « Relations Humaines » joue à plein. Chose qu'hélas, trop de commerciaux modernes ne veulent pas admettre.

Puisque nous arrivons maintenant au moment de 1951 où nous allons passer nos accords avec l'I.C.I et cela va devenir bougrement sérieux, laissez-moi vous faire sourire un peu en vous faisant entrer dans les coulisses de la Carrosserie.

Le Salon de l'automobile était pour nous-tous un cauchemar. En sus de sa préparation qui durait des semaines, il fallait ensuite rester en première ligne pendant dix jours, souvent de huit heures du matin à généralement deux à trois heures du lendemain. Les provinciaux profitant de leur séjour à Paris pour bringuailler aux frais de la princesse, il fallait demeurer avec eux pour déjeuner ou dîner, ou pour aller dans une boite de nuit à la mode. Et pendant tout ce temps là, il fallait boire, fumer, parler; puis encore parler, boire, fumer; rester en forme, amical mais constamment sérieux, et surtout se surveiller « être en représentation permanente »; savoir refuser sans dommage ce que vous saviez qu'on allait vous demander, ou au contraire, obtenir ce que vous saviez qu'on voulait vous refuser... A la fin de ces dix jours, nous étions vidés !...

Pendant un certain nombre d'années, nous offrions un spectacle à nos clients et c'était votre serviteur qui était chargé de l'organiser. Ils ont eu lieu ainsi, à la Lune Rousse, au Musée Grévin, au Théâtre des Capucines, à la Comédie des Champs Elysées, au Moulin de la Galette, et au Théâtre Rochechouart. Et j'en oublie un ou deux autres.

Pour que chaque fois, tout soit parfait, que rien ne rate, que de cheveux blancs nous nous sommes faits!... Et c'était toujours aux tout derniers moments que quelque chose accrochait!

Je me souviens par exemple, de ma terreur, lorsque j'ai constaté que les énormes Peter Sisters engagées pour la représentation, n'arrivaient pas à passer par la porte trop étroite du petit Théâtre du Musée Grévin elles ne pouvaient entrer en scène !... Il a fallu casser le chambranle à la hache, ce qui a donné lieu à un spectacle imprévu du plus bel effet, les Peter Sisters jouant magnifiquement le jeu, le Directeur du Musée engueulant le pompier qui avait utilisé sa hache sur ma demande -me prenant pour le patron du théâtre- et les spectateurs éberlués mais ravis, se demandant ou était la farce et ou était le réel.

Et la fois où je ne sais quel accompagnateur noir refusa de jouer sur le piano de la scène, sous prétexte que lui, ne pouvait utiliser qu'un piano à queue! Le problème a trouvé sa solution dans un compromis, la mise à sa disposition de deux bouteilles de Johny Walker prélevées au Bar du théâtre, avant le lever du rideau. D'où apparition soudaine devant le public interloqué, d'un grand nègre hilare et titubant, absolument déchaîné, qui improvisa un numéro exceptionnel dont on doit encore parler dans les chaumières.

Et ce récital des Frères Jacques, rendus furieux par la tiédeur des applaudissements de nos clients, qui refusaient de revenir en scène, « pour des pignoufs » après l'entracte !

Et au théâtre des Arts, où la directrice ne payant pas -ou payant mal- ses artistes, ceux-ci menaçaient de faire grève et de ne pas assurer la représentation s'ils ne recevaient pas un substantiel acompte, alors que tous nos clients étaient installés dans leur fauteuil.

Et la fois où nous avions pris en photo un de nos agents du Sud-ouest, bien installé dans son fauteuil et faisant son gros matou aux côtés d'une charmante personne que nous avions prise pour son épouse alors que c'était... sa secrétaire! Le malheur a voulu que ce fût l'épouse qui reçoive la photo... Il a failli divorcer et nous avons été à deux doigts de perdre le client.

Et ce salon, où notre nouveau directeur commercial -mais là, j'anticipe de vingt ans au moins- m'avait demandé de retenir table ouverte, midi et soir, pendant les dix jours de ce salon, chez Drouant. Ceci, pour recevoir nos plus gros clients que je lui présenterais... Ah! Je m'en souviendrai particulièrement de celui-ci !

Beaucoup de personnes envient les commerçants qui se paient de bons repas aux frais de leur société, sous prétexte que c'est à table que l'on fait les bonnes affaires".

Miséricorde! S'ils savaient que pour un repas agréable, neuf sont d'horribles corvées... Toujours par le fait d'abord de cette fameuse « représentation permanente » dont je vous ai parlé ci-dessus, mais surtout parce qu'il faut généralement discuter âprement de sujets qui agissent sur vos boyaux plus qu'un kilo de sorbes pas mûres...

Et bien, ce salon-là, a été pour moi créateur d'embarras gastrique particulièrement sévère. Depuis ce jour, ne me parlez plus de Drouant, je vous en prie instamment !

Le premier jour fut loin d'être désagréable, bien que pour le dîner déjà, une certaine tristesse se soit vaguement emparée de mon esprit. Le second jour, la réalité était là : il fallait recommencer! Cela a été la bouffe à la grimace... Mais à partir du troisième, alors, si cela vous arrive un jour, je vous jure que vous ne voudrez plus voir ensuite sur votre assiette qu'une très mince tranche de jambon de Paris et qu'une toute-petite-petite pomme...

 

LA PERIODE NOIRE

(1959-1969)

 LES SIXTIES

Le moins que l'on puisse dire, c'est que pour DUCO, ces années furent une suite de fortes turbulences au cours desquelles le Bon et le Moins bon ne cessèrent de se croiser.

Nous ne pouvons en parler, me semble-t-il, qu'après avoir rendu un respectueux hommage à ceux qui, patrons et camarades ont quitté notre terre pendant cette décade: IN MEMORIAM.

M.M. DUCHE, CORVAZIER, FERRAND, ILLIG, BRUGUIERES, BRANQUE, SUCHET, CALMETTE, LAFUE, BOTTEREAU, DUPORTAIL, THEURILLAT, DURFORT, CHOPPICK, SOINARD, MENEGAUX, CUNISSET (Père), HOUCHARD, LAMB RECHT, VIEILLE, CORDONNIER, SIMONIN, REVILLE, JACQUOT, FORBRAS, LENOIR, ROCHE, Madame MOREAU. Et que ceux que j'oublie me pardonnent de là où ils sont. Ceux-ci, comme ceux qui disparaîtront plus tard, ont droit à notre souvenir ému et affectueux.

Ils ont tous bien mérité de DUCO...

Cette période n'échappe pas aux aléas de la vie où tout n'est pas beau, bon et glorieux, mais un mélange de choses bénéfiques, et d'autres beaucoup moins agréables.

Les turbulences qui vont survenir à la Direction mais aussi dans les différents services vont profondément influer sur la vie même de notre Société.

C'est tout d'abord le remplacement de M.. CORDIER par M. GACHET à la tête du Groupe, et l'arrivée d'un nouveau Président chez DUCO : M. ETIENNE.

Disons tout de suite que les méthodes de celui-ci s'avérèrent rapidement à l'opposé de celles de notre ancien patron. Son principe directeur était qu'il fallait que DUCO disposât le plus rapidement possible de collaborateurs jeunes et diplômés, que l'on pourrait facilement former à devenir les « grands as des années soixante dix ». Ses méthodes de commandement demeuraient « libres de tout sentiment », comme il aimait à le dire. Pour lui, la sensibilité n'était que de la sensiblerie, défaut capital qui ne peut que freiner toute progression...

C'était un précurseur, en somme! Un de ces patrons modernes, constamment à la recherche de performances et d'efficacité, et dont les "cadres" ne peuvent avoir qu'une seule devise: « Toujours plus, toujours mieux - Zéro défaut - Qualité totale... »

Dur, dur... ! Mais nous, les anciens, avons-nous le droit de le critiquer ? Sommes nous certains, qu'aujourd'hui, notre mentalité ne serait pas identique à la sienne? L'expérience prouve qu'un patron exigeant réussit mieux qu'un « brave type ». Et nous, qui nous considérons comme ayant été de bons collaborateurs, nous préférons les premiers aux seconds !

Cependant, nous aurions aimé que celui-ci prenne un peu plus de ménagements: qu'il ait un peu plus d'égards! Il nous aurait alors donné la sympathique impression d'avoir une pensée pour ces cadres typiques, ces bons vieux serviteurs d'antan qui s'identifiaient pleinement à leur « boîte » et dont toute la vie s'écroulait brusquement, le jour où quelqu'un changeait les règles du jeu et les plaçait sur une voie de garage.

Ensuite, mais ceci n'est-il pas la résultante de cela, pendant tout le cours de cette « période noire », nous avons vu les postes de responsabilité soumis à d'incessantes allées et venues.

De nombreux anciens vont donc partir ou être mutés, pour de multiples raisons. Mais n'étant plus assez jeunes, n'ayant pas le profil type de l'homme idéal aux yeux du Président, rechignant à se plier aux nouvelles règles qu'ils réprouvaient ou comprenaient mal, ils partaient tout simplement parce qu'il ne plaisaient pas au Président. Tous étaient pourtant d'excellents éléments. Même si certains n'étaient seulement que très bons.

DUBIEN, Directeur commercial, fut nommé Directeur général adjoint, un poste qui dès le départ fut purement honorifique. Mlle CAILLAUX, Directeur technique et de production, fut placée au siège comme « Conseiller Technique ». A la tête de la « Société chimique pour industries diverses » à Castres, là où DUCO s'était replié pendant la guerre, elle s'occupa de la production des siccatifs (Nuodex) et de la fabrication des premières peintures en poudre.  PETRY, venu de Stoner-Mudge qui lui succéda, occupa ce poste fort peu de temps remplacé par HAEGELI qui à peine eut-il inauguré en 1963 « Le laboratoire-Nord » tout neuf qu'il partit au siège comme « Conseiller technique et étude des produits nouveaux ! »

 
GAIGNARD, patron de la Réserve se retrouva au poste « Fantôme » de « Relations sociales » et fut remplacé par VERDON muté de son poste d'adjoint au chef des achats.

SAFFRE, responsable du Laboratoire « Couleurs » se retrouva Chef de la « Démonstration », quant à DEBLACHE, Chef du Laboratoire « Air » il donna purement et simplement sa démission pour partir chez Prochal, une filiale de Ciba.

HELLER, déjà malade (il devait succomber peu après d'une crise cardiaque) laissa le laboratoire Bois à BOYER et bientôt à l'équipe AUSSEDAT-LEBAU et le Laboratoire Electro-Ménager à BERTEAUX (Fils) et SAISON, le futur directeur technique, poste occupé alors par PETRY.

C'est à cette époque qu’ETIENNE engagea un jeune centralien comme Directeur industriel: J.C. MAILLET, un autre centralien B. CHOPINET va s'occuper des « Travaux » assisté de HOCHIN à « L'entretien ».

STEIN, Directeur d'usine parti, PETRY fit venir STORCK de « Stoner » pour lui succéder, assisté de ROCHETTE, responsable des Ateliers de production.

ETAIX et ILLIG sur le départ eux-aussi, c'est POULAIN, jusqu'alors adjoint de Mlle CAILLAUX qui créa le service « Procédés de fabrication » et qui, avec DUFLOS va « révolutionner » les méthodes de production. Adieu les vieux broyeurs à boulets, le « WERNER à piston ! » les trois-cylindres, rangés au musée, et place aux « Disperseurs à sable » (le fameux sable d'Ottawa), modernes et plus rapides, autorisés sans redevance grâce aux travaux de DUBIEN aux USA entre 1940 et 1956.


DUCO labo nord

Cela obligea les « vieux metteurs au point » à faire passer leurs « formules » dans le moule des nouvelles gammes mises en place avec l'aide du tandem CHAVETON-LAFARGUE du Bureau de Fabrication. C'est aussi à cette époque que la codification des matières premières héritée du système DUPONT, totalement anarchique, fut remplacée par une mouture plus logique, intermédiaire de celle qui, une dizaine d'années plus tard, serait une merveille de rationalité.
Le Laboratoire Nord

Cette période fut aussi marquée par un nouveau phénomène social: « la mise à la retraite anticipée ! »

Certains en profitèrent, d'autres y furent contraints comme PERETTI (Directeur de la comptabilité), ALBA (Labo SNCF), JEANBERT (liaison technique/commercial), BRUGUIERES (relations publiques de M. DUCHE) et les secrétaires de DUCHE et FERRAND, Mmes RIGNEAULT et POTIRON dont le sort était directement lié à celui de leurs patrons! Et puis encore DESHA YES (chef du personnel) CUNISSET-père et HENRY (Service Carrosserie intérieur et international), COURT (Adjoint au Secrétaire général). PETRY et LAPORTE font partie des pertes importantes de ce moment là, comme MORISOT plus tard, et SAISON, le directeur technique qui lui, tiendra jusqu'en 1972.

Les autres noms qui vont suivre furent tous, ou quasi tous de très bons collaborateurs, techniciens ou commerçants: DAMBLANT, ODENT, CARRON, GEORGES, DELACUISINE, PATERNOT, CADORET, LEROY, ROUILLON, DELEPINE, sans oublier dans les Secrétariats: Mmes BIZOUARD, GIACOMELLO, GILETTE ou LAPALUD et des « Démonstrateurs » comme PLOMBTEUX et VIGUIER, et pardon à ceux que ma mémoire ne me permet plus de citer ici.

Que doivent penser les nouveaux camarades arrivés au milieu de ces turbulences? Nombreux furent heureusement ceux qui tinrent bon et réussirent à compenser toutes ces pertes.

C'est à ce moment qu'un handicap sérieux vient fondre sur nous. Alors. qu'on nous demandait d'obtenir des super-résultats, la centrale de Dynamite manque de moyens financiers et fait appel à Nobel-Bozel qui ne tarde pas à prendre le contrôle complet de DUCO (ICI conservant néanmoins 20% du capital environ).

La Nobel, avec les 52 sociétés qu'elle contrôlait, n'avait pas la trésorerie de ses appétits. Que de tours de force et de miracles les ingénieurs et leur labo, la production, les gestionnaires des stocks, les commerçants ont-ils bien pu réaliser alors tous au bord de l'explosion, pour approcher les résultats demandés !

Au même moment, deux coups durs sévères nous tombaient sur le crâne. Notre usine d'Alger fut nationalisée par le nouveau pouvoir, sans compensation financière. Les principaux responsables rentrèrent en France. M. JOUSSEN, polytechnicien, ancien officier de l'armée de l'air, qui était directeur de l'usine devint le bras droit de C. GUITTET, comme Directeur Général. M. ROGER fut nommé adjoint de L. DUPRE LATOUR le Directeur commercial.

M. DIDIER (père) devint responsable du laboratoire Industrie, succédant à M. CAVELIER qui s'occupera de la production. En échange M. GUILLEMIN quittera GUITTET pour Alger.

Notre plus important client dans le Bâtiment, les Etablissements Lesaint, que notre direction générale avait exigé de gérer elle-même, furent mis en faillite. Le vieil adage « A chacun son métier » prenait là une valeur de véritable postulat.

Ces pertes sèches venant s'ajouter à des acquisitions sans doute trop imprudentes, n'ont pas arrangé notre trésorerie. Un terrain à Louhans (Côte d'Or) destiné à recevoir notre nouvelle usine (décentralisation déjà... !) la société Levasseur, dont le seul avantage semble avoir été en définitive, l'arrivée chez DUCO des deux frères SAUVAGET et de GRUNINGER. Deux succursales, en Espagne (Moncar), en Grèce (Vechro), peu rentables, l'une et l'autre, si je m'en souviens bien. Ce cumul d'évasions financières nous a empêchés alors d'investir dans l'existant, et pourtant, malgré tous ces avatars, nous n'étions pas loin de répondre aux exigences de la Nobel !

Enfin, de nombreuses négociations en cours depuis longtemps connurent l'échec. Ce fut le cas avec Astral- Celluco parti rejoindre AKZO Corona où nous exigions d'avoir la majorité, la Seigneurie qui partit chez un « pétrolier », et Novemail dans le département « Droguerie-détail », et Bouvet, le spécialiste du bois, vendu aux Allemands, Villemer bien placé dans l'automobile et dont nous aurons à reparler et Ripolin soi-même qui, ironie de l'histoire, dix ans plus tard en 1979 et par Groupe interposé absorbera DUCO !

Enfin, à mettre également au débit de cette période, la dégradation lente mais certaine, des rapports entre les Directions Générales de DUCO et I.C.I., ainsi que la rupture des relations amicales avec notre principal Confrère Valentine et sa déclaration de guerre qui nous força à modifier notre tactique commerciale et surtout, nous fit perdre l'exclusivité de la fourniture des laques chez Simca.

Mais que personne ne s'attriste: nous l'avons dit, ce sont là les aléas normaux qui surgissent toujours, un jour ou l'autre, dans la vie.

 - C'est ainsi que s'achevait le manuscrit de notre ami XM ABBATI.

- L'idée de tout arrêter là faillit s'imposer à nous tant la tâche à accomplir (et sans lui) était énorme.

Et puis, dix ans après, et de nombreuses recherches, et grâce à la collaboration de quelques fidèles "Anciens" ayant vécu cette période, nous avons rédigé la fin de cet ouvrage. Que tous en soient ici remerciés.



LES GRANDES INNOVATIONS
 

La situation financière de la Société à cette époque est loin d'être mauvaise. Nous sommes en effet les premiers pour les "Peintures industries", notamment près des Constructeurs automobiles, et ce, malgré nos pertes chez Simca.

Nous occupons la deuxième place en « Carrosserie », et un rang très enviable dans le « Bâtiment » grâce à GUITTET et EUROCOLOR. Ce qui, en chiffre d'affaires nous situe en troisième position derrière CORONA et VALENTINE.

Cela va nous aider au moment d'affronter la concurrence en face des grands changements technologiques qui se préparent.

Pour les Carrossiers, ce sera l'avènement des « machines à teinter » grâce auxquelles l'utilisateur réalisera lui-même sa teinte !

Un autre grand secteur de notre profession va lui aussi connaître sa révolution avec « L'ELECTROPHORESE » utilisée pour le revêtement industriel dans l'automobile !

Présent au démarrage des études de laboratoire et grand spécialiste dans ce domaine, laissons notre ami G. DAMBLANT nous raconter cette grande aventure.


DUCO ET L'ELECTROPHORESE par Guy. DAMBLANT 

G. D.
 Utiliser le déplacement et la coagulation sur un support métallique de molécules organiques en suspension, solution ou dispersion dans un milieu aqueux sous l'action d'un courant électrique continu suivant le phénomène dit électrophorèse était une idée retenue dans un brevet de la société Crosse et Blackwell pour le dépôt de vernis de correction sur des boîtes de conserve. Vers la fin des années 50, deux groupes "Automobile" associés à des fabricants de peinture reprirent le procédé en l'appliquant à des peintures pigmentées destinées à la protection des véhicules contre la corrosion.

Cette méthode d'application présentait, à priori, de nombreux avantages potentiels l'immersion des caisses devrait garantir le dépôt d'une couche uniforme sur toutes les parties, y compris les plus inaccessibles par des procédés classiques, la récupération par rinçage de la peinture non coagulée autoriserait un rendement maximum, le trempé dans une installation entièrement automatisée se traduirait par d'importantes économies de main-d'œuvre, l'utilisation d'un milieu aqueux éliminerait les risques d'incendie et diminuerait la pollution.

Dés le début des années 60, les essais à l'échelle industrielle commencèrent aux Etats Unis chez Ford en association avec Glidden et en Angleterre chez Pressed Steel dont le partenaire était ICI. Des cuves pilotes de 40 à 60 m3 furent construites permettant d'étudier les problèmes liés à la circulation du bain, à son maintien en suspension, à la filtration et au maintien de sa température, à sa stabilité dans le temps. Dans le même temps, différents types de résines étaient testées et les conditions opérationnelles étaient déterminées. Après de nombreux tâtonnements, ICI annonçait à la fin 1963 qu'un système industriel était au point et que des essais en petite série démarraient avec les constructeurs.

DUCO étant filiale à 25% du groupe ICI avait un contrat qui lui donnait, moyennant royalties, accès aux nouvelles technologies. Au début 1964, un accord fut signé entre les deux sociétés et une mission fut dépêchée à Slough, siège du centre de recherches anglais, pour en rapporter le maximum d'informations afin de commencer, aussi rapidement que possible, les premiers travaux à Stains. Dès le mois d'avril, une petite équipe était constituée dirigée par J .P. NETILLARD venu de la Société Guittet.

Le matériel nécessaire était approvisionné et les premières mises au point purent débuter. Il s'agissait, dans un premier temps, de reproduire le processus de fabrication puis de préparer des échantillons et, enfin, de les présenter à nos futurs clients. La formule originale reposait sur une résine phénolique du commerce ce qui présentait quelques graves inconvénients, non-maîtrise du coût et de la qualité, difficulté à faire progresser le produit et incertitude à terme sur la fiabilité des livraisons. Aussi, ICI, a réussi à développer sa propre technologie résine, reposant sur des esters d'époxy, dont on pouvait avoir la responsabilité totale; cette technologie nous fut transmise vers la fin de l'année 64 et, avec ajustements et améliorations, elle a suivi DUCO tout au long de son aventure électrophorèse. Il faut, à ce sujet, rendre hommage à l'excellent travail de Monsieur CAHN et de son équipe qui ont su, brillamment, au fil des années, adapter, développer et fabriquer ces résines anioniques avec un suivi de qualité qui a assuré le succès du produit jusqu'à l'apparition des résines cationiques au début des années 80.

Pour compléter les informations transmises à nos clients et leur permettre de constater, en vraie grandeur la faisabilité du procédé, la direction, sous l'impulsion de Jacques SAISON, procéda à un important investissement sous la forme d'une petite ligne pilote, installée dans les locaux de l'usine de Stains et placée sous la responsabilité de C. ROQUES. Cet équipement comportait un convoyeur, une cuve de 1000 litres et un sas de rinçage; les pièces étaient ensuite décrochées et cuites dans une étuve statique. Première de son genre en France, cette ligne a été utilisée de façon intensive pour des démonstrations en présence des utilisateurs potentiels et pour traiter des pièces de tous types destinées aux contrôles qualité. Il faut noter que mis à part les constructeurs intéressés au premier chef, de nombreuses industries utilisant et peignant du métal (électroménager, matériel électrique, mobilier, cycles et tous les sous-traitants de l'industrie automobile) ont, tout de suite, été convaincues de l'intérêt économique et technique du nouveau procédé.

L'apparition de cette technique de revêtement révolutionnaire suscita un grand intérêt chez les constructeurs français qui entrevoyaient là une solution à leurs problèmes chroniques de corrosion et de perforation des véhicules. De nombreuses publications fleurirent, des colloques et séminaires furent organisés permettant aux fournisseurs potentiels disposant de cette technologie de présenter leurs produits, de détailler leur mode d'exploitation et de s'affronter en comparant les avantages des différentes mises en œuvre. Les concurrents directs de DUCO sur le marché français étaient alors Merville & Morgan qui exploitait une licence Glidden et Corona lié à PPG ; les étrangers étaient aussi présents par DKH et Glasurit utilisant des brevets allemands ou japonais.

Grâce à l'action commerciale vigoureuse et efficace menée par Messieurs WEIL, ABBATI et BERTEAUX des contacts techniques purent rapidement être établis avec les quatre constructeurs français de l'époque. Le processus d'homologation était, chez chacun d'entre eux, pratiquement le même: essais en laboratoire sur des bains de 4 à 20 litres pour vérifier les propriétés principales du primaire, résistance à la corrosion, stabilité et pouvoir de pénétration (aptitude à déposer une épaisseur significative dans les corps creux) puis essais en vraie grandeur par trempé de pièces, éléments ou caisses entières dans des cuves de 1.500 à 40.000 litres. De plus, des démonstrations étaient organisées en Angleterre sur les chaînes qui commençaient à produire en petites séries et qui permettaient de recueillir des informations essentielles pour la conception des futures lignes de trempé.

Les différents constructeurs avaient des objectifs communs: remplacer les trempés de bas de caisse, peu résistants à la corrosion, par une couche uniforme de 15 à 20 microns, la gamme restant la même avec un apprêt au pistolet et les couches de laque. Peugeot, en la personne de son directeur de la Carrosserie, Monsieur DUCLOS, avait un objectif beaucoup plus ambitieux: déposer une couche de primaire électrophorèse de 30 à 35 microns, sans rinçage sur laquelle la laque serait appliquée directement. Ce processus devait à la fois améliorer notablement la qualité mais aussi apporter par son automatisation, de substantielles économies.

Electrophorèse chez Peugeot Sochaux
4 cuves d'électrophorèse  aux usines Peugeot de Sochaux

Les propriétés requises étaient très loin des performances initiales du produit; de longs mois de mise au point furent nécessaires à l'obtention du résultat désiré. Finalement, un échantillon fut homologué et autorisa le remplissage de la cuve pilote où de nombreuses caisses furent traitées dans le courant de l'année 1965. Ces essais se poursuivirent au cours des années suivantes débouchant sur des améliorations de stabilité et de pénétration. La décision de passer à l'échelle industrielle fut prise et en 1968 quatre lignes parallèles étaient lancées, assurant la production totale de l'usine soit 1600 véhicules / jour. Il faut reconnaître que l'objectif initial ne fut que partiellement atteint après plusieurs mois de production difficile, Peugeot dut admettre la nécessité d'un rinçage après trempé, à la fois pour des raisons techniques et économiques et a procédé à des modifications d'installation.

La position de Renault était plus mesurée; fabriquant ses propres peintures dans son usine du Mans, la Régie tenait d'abord à s'assurer de la fiabilité du procédé avant, éventuellement, de conclure des accords de licence. Nos produits furent essayés puis homologués en laboratoire à Billancourt et furent testés en vraie grandeur sur une chaîne de production de roues à Sandouville à partir de 1965. Résultats très satisfaisants mais qui ne débouchèrent pas sur une exploitation sur caisses. Renault préféra par la suite développer sa coopération avec DKH en utilisant une technologie allemande dans les années 70. L'importance des études de laboratoire amène alors la société à engager H. BOHNERT en 1967, puis C. VERREL en 1968 pour renforcer l'équipe technique.

Nos excellents rapports avec les laboratoires de Poissy et notre position de premier fournisseur chez SIMCA nous permirent de réaliser de très nombreux essais et de faire homologuer le produit. Malheureusement, les difficultés financières de la société (alors Chrysler) n'autorisèrent pas l'utilisation industrielle qui nécessitait des investissements lourds. Ce ne fut que beaucoup plus tard, à la fin des années 70 que des trempés électrophorèse remplacèrent le vieux trempé solvant.

Notre entrée chez Citroën fut plus difficile: depuis de longues années la présence au laboratoire central d'un ancien collaborateur de DUCO nous interdisait toute livraison. Néanmoins, la nouveauté du procédé incita la direction à essayer le primaire électrophorèse, de nombreux tests furent effectués en laboratoire et, en 6566, une cuve de 1000 litres fut remplie pour tremper des éléments (portes, ailes, longerons). Essais satisfaisants puisque la ligne de production de Javel fut confiée à DUCO au début des années 70.

La pleine réussite du lancement du primaire électrophorèse en France, avec l'aide sympathique et efficace de nos amis anglais a justifié la confiance mise à l'époque en cette nouvelle technologie ainsi que les importants investissements réalisés à l'époque tant en matériel de broyage qu'en réacteurs de cuisson de résines. Elle a assuré pendant près de dix ans une position dominante de DUCO sur ce marché, entraînant une prospérité incontestable. Durant cette période des produits anioniques concurrents sont apparus qui, sans posséder toutes les qualités, notamment anticorrosion, de notre produit, ont réussi à prendre place sur le marché. Les recherches continuaient à travers le monde pour mettre au point un produit cationique dont les propriétés surpasseraient de très loin celles des primaires anioniques. ICI poursuivait ses recherches dans cette voie mais ne réussit pas à mettre au point un produit vraiment opérationnel; pour des raisons de stratégie interne, ICI préféra concentrer ses efforts sur les peintures bâtiment qui constituaient sa force principale et réduisit ses équipes de recherche axées sur l'électrophorèse jusqu'à abandonner complètement ce créneau. Ne disposant plus d'un support technique venant d'Outre-Manche, DUCO fut incapable de répondre efficacement aux attaques de la concurrence et perdit peu à peu ses positions et vit sa principale source de profit se tarir, avec son cortège de cessions et absorptions qui déboucha sur le résultat fatal que tout le monde connaît.

 

Au laboratoire « Constructeurs » dirigé par P. BERTEAUX il règne toujours une grande activité pour la mise au point de nouveaux produits.Les pertes subies chez Simca doivent être compensées par d'importantes prises de marché près d'autres grands de l'automobile.

R. DUFLOS arrivé en renfort dans ce laboratoire nous relate deux faits caractéristiques de l'état d'esprit offensif qui y régnait alors.

 

LE RETOUR CHEZ CITROËN  par R. DUFLOS

 Comme le raconte G. DAMBLANT, nous avions réussi à implanter une cuve de mille litres d'électrophorèse chez ce constructeur. Un jeune ingénieur CROATTO, suivait techniquement l'installation, M. BESANCON était notre correspondant permanent. Régulièrement il récupérait un échantillon du bain pour analyse, et cela lui permettait de papoter un peu dans l'atelier et d'être au courant de certains faits. C'est ainsi qu'un jour, nous ramenant son échantillon, bien enveloppé dans son papier d'emballage, la ficelle munie d'une poignée « Galeries La Fayette » pour ne pas se couper les doigts, c'était le roi du petit paquet bien fait, il nous rapporta une intéressante conversation. Citroën ne parvenait pas à livrer une commande d'une dizaine de Maserati, le fournisseur de peinture buttant sur des problèmes techniques.

Il s'agissait d'un gris métallisé. Tous les essais étaient négatifs, refusés à cause de la présence de nombreuses piqûres !

Il faut dire que Citroën était le seul et le dernier à utiliser des laques métallisées en Glycéro, avec séchage en tunnel I.R. Alors que tous ses concurrents travaillaient en acrylique depuis longtemps.C'était peut-être l'occasion à saisir.

Après discussion avec son ami P. BERTEAUX pour savoir si nous étions prêts à relever ce défi, il eut le feu vert pour faire -mine de rien- la proposition de nos services. C'est donc en désespoir de cause que Citroën nous autorisa à présenter notre produit, très rapidement.

Cela ne fut pas facile. Je le répète, nous avions abandonné depuis longtemps ce genre de laque. Un rendez-vous nous fut fixé pour un vendredi, à la première heure. C'était le Vendredi Saint !

Les contrôles du Labo étaient bons, G. DARCIS (Notre ami GILBERT qui eut une fin tragique, dans un accident de voiture avec sa femme et sa fille, en partant en vacances pour son cher Mimizan) nous avait fignolé la teinte, et avec C. LEFER nous partîmes donc très confiants.

Un premier élément fut peint, en présence de M.M TROUCHE et HARRING, excusez du peu! La pièce fut examinée à la loupe -verdict: "c'est rempli de piqûres !". Invisibles à nos yeux, ces piqûres étaient sans doute des petits grains d'alu. Passons! Nous avons droit à un essai de rattrapage avec un diluant plus lourd. Là encore, pour nous, le résultat est bon. Ne voulant pas paraître céder facilement, on nous oppose un argument imparable: « Vous n'êtes pas à la teinte, retournez à l'usine, faites la correction nécessaire et revenez cet après-midi. »

La matinée était déjà bien avancée et nous ne sommes arrivés à Stains qu'après quatorze heures.

Pas grand monde à l'usine en cette veille de fête, seule au Labo Colorimétrie H. CHAROFF accepte de faire une correction de pur principe. Sans même prendre le temps de manger un morceau, nous repartons chez Citroën où on nous attendait pour peindre un véhicule. Ce fut un succès. Sans doute, à contrecœur, nous fûmes homologués.

-« Revenez lundi avec la peinture pour une dizaine de voitures ».

« Lundi ?" Je laisse tomber: "Impossible, c'est Pâques ». On regarde d'un drôle d'œil ce jeune impertinent qui se permet cette remarque. Ils ont besoin de nous, nous avons besoin d'un peu de temps. Après discussion, le délai est fixé à une semaine. C'est bien court. En effet, l'essai réalisé ne l'est pas à partir d'un échantillon prélevé sur une fabrication suffisante pour les dix véhicules, comme cela aurait du être, mais sur une réalisation de quelques litres, au Laboratoire !

Dès le mardi, la vraie fabrication est déclenchée en urgence et nous tiendrons les délais!

- A petite chose, grands effets.

L'année suivante nous serons autorisés à présenter une teinte métallisée pour la ligne de O.S. de l'usine de Rennes, ainsi que d'autres, unies, pour les 2 C.v., y compris à Bruxelles.

Ce succès fut certainement pour quelque chose quand J.P. TOURNILLON sera homologué avec les laques DUCO pour assurer le démarrage de la toute nouvelle usine d'Aulnay.


FIAT-UNIC (Usine de Trappes) par R.DUFLOS

 C'est à la suite de la défection de Villemer que nous allons être consultés par cette importante usine de production de poids lourds, où nous sommes déjà présents grâce à l'électrophorèse, là-aussi.

Une réunion de crise fut organisée à Trappes. Présidée par le grand patron de Fiat-Unic, entouré de ses principaux collaborateurs, il y avait autour de la table les représentants des chaînes de montage et d'étuvage, une équipe complète de DUCO avec la direction technique, les responsables des laboratoires « Electrophorèse », « Constructeurs » et le Service commercial.

C'est la réunion la plus étonnante à laquelle il m'ait été donné d'assister !

- Messieurs: Nous avons en stock de quoi assurer notre production de trois semaines.

- En peinture, vous avez donc quinze jours pour prendre le relais.

- Je ne veux plus entendre des rejets de responsabilité entre les Fournisseurs de sous-couches et de laques, ou avec nos installations. Tous les protagonistes sont autour de cette table. Mettez-vous d'accord sachant que DUCO fournira les revêtements peintures de A à Z !

- Pas de questions?

- Je vous laisse travailler

- Rendez-vous dans deux semaines.

Cela avait le mérite d'être clair et net. Il ne restait plus qu'à exécuter.

Nous avons donc récupéré toutes les indications techniques relatives à la chaîne: vitesse de défilement, matériel d'application, courbes thermiques des fours entre autres. Une jeune fille charmante nous procura les plaquettes des teintes, Mlle. A. CESARINI, celle-là même qui devait venir seconder J. JONCKHEERE une dizaine d'années plus tard ! La suite fut animée et passionnante.

La première semaine fut consacrée à une multitude d'essais au laboratoire pour mettre au point un arrêt-four couleur pain d'épices, et le « blanc Unic », la principale laque de chaîne.

La deuxième semaine, avec quelques petites fabrications pilotes, nous avons, avec C. LEFER positivement pris pension à l'usine de Trappes.

Ce fut une belle réussite! L'apprêt est homologué sans grandes modifications, les utilisateurs le trouvent même meilleur que l'ancien !

Puis c'est le blanc qui passa tous les tests pour être agréé. Suivirent les autres teintes en commençant par un superbe rouge vif. Quelques semaines plus tard on nous commanda même une peinture kaki-mat pour livrer 400 véhicules à l'armée chinoise.

Une longue collaboration allait pouvoir se mettre en place, sous la bienveillante animation commerciale de notre ami Marc SAUVAGET.

Enfin, il s'est produit à cette occasion un événement unique dans ma carrière chez DUCO. C. LEFER et moi-même reçûmes les félicitations officielles de notre Direction (ce qui à nos yeux était déjà beaucoup) avec une petite prime pour récompenser nos efforts et tout le temps consacré à cette réussite. Cette pratique n'existait plus depuis longtemps et ne se renouvellera jamais!


LA CARROSSERIE, L'ARRIVEE DES MACHINES A TEINTER  par J.F LEBAU

 On appelle ainsi le secteur de la réparation automobile, alors que celui des Constructeurs est dit de «  première monte » dans notre jargon !

Depuis sa création, on fournit au carrossier réparateur une teinte toute prête, réplique de celle d'origine, en qualité nitro-cellulosique dans les débuts, puis en alkydes, les laques glycérophtaliques ensuite.

Il n'y avait que peu de teintes sur le marché: Le noir, bien sûr: avec aux USA les Ford, en France, les célèbres tractions-avant Citroën 11 et 15CV, et des blancs cassés ou des ivoires.

Mais, petit à petit, les constructeurs innovèrent avec des gris, des bleus, des verts et même des rouges malgré leur coût.

Les deux grands fabricants de teintes pour la réparation à savoir Valentine et DUCO, qui se partageaient 80% du marché furent alors obligés de stocker toutes ces teintes sortant chaque année des usines.

Mais, comment savoir à l'avance la couleur des voitures les plus accidentées? Pour répondre le plus rapidement possible à la demande il fallut donc stocker de plus en plus !

De plus, certaines teintes peu demandées devaient être « réutilisées » dans le service des R.A.D., Retour A DUCO !

Bref, c'était devenu un problème financier qu'il fallut résoudre grâce au service technique. Bien sûr, la même question se posait aux U.S.A. C'est alors que la Société R.M. a mis sur le marché des teintes de base (ou monopigmentaires), accompagnées de « formules » donnant la composition de la couleur à préparer par le carrossier.

Ces bases étaient alors au nombre de 70! La réaction de DUCO, et de Valentine aussi d'ailleurs fut très nette: Jamais nos clients n'accepteront de réaliser eux-mêmes la teinte demandée !!!

Les Anglais, puis les Allemands prirent sagement le chemin de la machine à teinter, mais DUCO mit cinq ans avant de réagir vraiment et de se lancer à corps perdu dans la bataille. Cette innovation était pourtant la garantie de la rentabilité, de la souplesse de la livraison, d'un stockage minimum, mais d'une modification de stratégie commerciale.

Les couleurs pouvaient changer dans le temps, au soleil, aux intempéries, ou par mauvaise qualité des pigments et elles posaient au carrossier, qui n'était pas un coloriste, le problème de la réparation invisible. Les ajustements de couleur devenaient désormais possibles grâce aux fameuses « teintes de base ».

DUCO machine à teinter DUCO machine teinter

Alors DUCO a travaillé la question avec un certain succès. Cette technique des mélanges est fort simple, en théorie, pour ceux qui ont l'habitude de composer eux-mêmes leur couleur. Il n'est surtout pas question de mettre un frein aux initiatives des coloristes, ni d'obliger le carrossier à embaucher ce genre de spécialiste. Les formules fournies doivent être applicables par n'importe qui, même si un stage de formation est recommandé. En revanche, les premiers matériels fournis semblent aujourd'hui appartenir à la préhistoire! J'en veux pour preuve que la jauge à flotteur qui a suscité tant de commentaires dans notre clientèle.

Les difficultés pour réaliser une teinte exacte étaient en effet de deux ordres: une parfaite homogénéité de la teinte de base, d'où le pupitre avec les agitateurs permanents, et une pesée, ou une mesure volumétrique exacte des quantités de chacune d'elles, à l'aide d'un plongeur pneumatique déterminant avec précision la hauteur de liquide.

Il faudra cependant attendre le début des années 80 pour que ce procédé atteigne la perfection, avec la série « MX » de DUCO, et l'aide apportée à Mme JONCKHEERE, par l'informatique en la personne de M. de MONTLAUR.

La fin de cette période "noire" avait été marquée par les grands mouvements sociaux de mai 68 ! Malgré la fermeture de l'usine pendant plusieurs semaines, il n'y eut pas trop de bouleversements et dans l'ensemble, on ne peut pas dire non plus, qu'il y a eu des" représailles" envers les grévistes, volontaires ou non.

Reconnaissons cependant que les principaux « meneurs syndicaux » ont vu leur plan de carrière singulièrement freiné, alors que pour d'autres ... !

Et pour tout le monde, sans distinction, il a fallu rattraper le temps perdu... en dépit du proverbe! Bref, donner un sacré coup de collier, heureusement contrebalancé par la perspective de l'allongement des congés payés! A quelques éléments près, les équipes commerciales, techniques et de production vont rester en place pour la période « rouge » qui ya s'ouvrir.

 

 

LA PERIODE ROUGE

(1970 - 1979)

 


C'est J.C. MAILLET, qui avait été engagé par M. ETIENNE, qui dirige la Société.

Une nouvelle structure financière est également mise en place. La Centrale de Dynamite qui possède 50% de ROUSSEL-U.C.L.A.F. est engagée à hauteur de 43% dans le groupe NOBEL-BOZEL qui détient 50% de NOBEL-HOECHST, 41 % d'ISOREL et 80% de DUCO.

Les efforts vont porter sur les deux secteurs de base piliers de la Société et qui restent lucratifs: les « Constructeurs » et la « Carrosserie ».

Nous avons vu comment avait démarré l'électrophorèse et comment des techniciens de valeur comme B. DELOUIS sont venus étoffer l'équipe de départ dont faisait partie Judith AMMAR. Malheureusement, J. SAISON, va quitter la Direction technique dès 1972. Chez les « Constructeurs », en 1973, arrive J.P. TOURNILLON appelé à succéder à P. BERTEAUX quand celui-ci partira en retraite en 1975.

Dans les services commerciaux, la cohésion semble fragile entre J. SAUVAGET et M. CASCUA, au point que ce dernier quittera la société en 1974. Une réorganisation devra se faire autour d'A. SANTELLI, responsable des chefs de région, et B. BRUNEAUX (en 1975) pour la « Carrosserie », et dont la direction d'ensemble sera ensuite assurée par l'arrivée de M. JUSMANN en 1976.

Cette époque marqua un profond changement dans le comportement de nos clients.

Les produits proposés tant par nous-mêmes que par nos principaux concurrents étaient excellents, si bien que la qualité seule ne suffisait plus. Il fallait y ajouter le service, la promotion, une action commerciale active et si possible originale.

C'est ainsi que fut organisée cette visite américaine que nous relate M. CASCUA, puis les années suivantes les sorties sur les grands circuits automobiles français dont nous parle J.F. LEBAU.


UN VOYAGE AMÉRICAIN

 En 1971, l'équipe « Technique-Commerciale » de DUCO pour le secteur carrosserie automobile sent qu'on entre dans une ère nouvelle. La mise au point d'une peinture de réparation en glycérophtalique à séchage rapide veut qu'elle soit accompagnée d'une campagne de lancement importante.

Après des débuts hésitants, la machine à teinter qui va révolutionner le travail du carrossier s'implante de plus en plus. Comment suivre ce mouvement et marquer la position en pointe de notre Société? L'équipe envisage un projet un peu fou! : Emmener un groupe de carrossiers français en visite aux U.S.A. pour voir et comparer nos méthodes.

Mais comment faire une sélection de nos Clients, et comment équilibrer le budget de ce grand voyage? Le problème était plus que difficile. Il fallait sérieusement argumenter notre projet avant de le présenter à la Direction !

Boston semblait être la destination toute indiquée pour ce séminaire d'information qui devrait comporter un programme très éclectique.

Une visite d'atelier de « Tourisme et Poids Lourds » ; la rencontre avec des dirigeants de chaînes de station de peintures complètes; des discussions avec des élèves de lycées techniques entourés de leurs éducateurs; des exposés par d'éminents professeurs d'Harvard.

Que pourrions-nous attendre de ce voyage? Pour les participants une ouverture sur les techniques appliquées en Amérique en comparaison avec nos propres méthodes, pas forcément en retard, et une vision sur le futur de la profession. Pour tous nos clients, la démonstration de notre vitalité, de notre volonté d'occuper une position avancée sur le territoire français.

Restait l'épineux problème du financement de cette expédition. Notre Direction donna son accord à une condition: que les participants payent une importante partie de leur voyage !

Malgré cela, 160 de nos principaux Distributeurs consentirent à mettre la main à la poche pour participer à ce voyage !

Ce fut un énorme succès dont on parla encore longtemps après !

X.M. ABBATI raconte les enseignements à retirer de cette expérience

Un grand voyage par XM ABBATI, Directeur à la Société française DUCO

 

« Un grand voyage oui, amical et utile...

Amical, parce qu'il réunissait des gens d'un même milieu passionnant, parlant tous le même langage et s'estimant mutuellement. Utile, non seulement parce que nous avons pu voir de près vivre les habitants de ce pays champion de la libre entreprise, mais aussi parce qu'il nous a permis d'abandonner nos complexes. Les complexes de Français que nous avons toujours tendance à transformer en critiques à l'égard de ce que nous voyons autour de nous, dans notre pays...

Si les voyages forment la jeunesse, ils forment aussi les adultes et nous avons pu constater là-bas qu'en dehors de cette connaissance de la rentabilité encore trop mal utilisée par la plupart d'entre nous, nous nous trouvions en présence d'une profession qui, confrontée aux mêmes problèmes que les nôtres, n'avait pas mieux réussi à les résoudre. Et en y mettant un tantinet de chauvinisme, n'avons-nous pas retiré l'impression même, que dans bien des cas nous aurions des conseils à leur donner..

Nos défauts sont grands, certes, mais ne sont-ils pas plus superficiels que réels? Et quand nos qualités peuvent s'épanouir, que ne réussirons-nous pas à réaliser ?

Que ce voyage donc nous ait permis de faire le point et de balayer les idées noires des Cassandre de toute espèce! Les professionnels de l'automobile ont encore de beaux jours devant eux! Et notre Société DUCO est fière d'avoir à continuer longtemps dans la voie qu'elle s'est tracée: les servir et grandir encore avec eux.. »
 

En définitive il nous paraissait que le réparateur américain cherchait surtout à tirer profit de son intervention auprès de son client, alors que nous cherchions, nous, à lui faire plaisir par un travail aussi proche de la perfection que possible !
Notre politique commerciale continua donc dans le même esprit de service à l'utilisateur, avec la mise en place d'un réseau de distributeurs conscients de leurs responsabilités, et compétents pour faire face à la concurrence dans un climat difficile.

L'information, la recherche de solutions modernes seront désormais au premier plan pour la réussite de cette nouvelle orientation de notre profession.

Ces idées, M. CASCUA eut sans doute du mal à les faire passer puisqu'en désaccord avec la Direction, il quitta son poste d'agent général en 1974 !

Comme pour tous les artistes, ce fut une fausse sortie! Mais une longue absence ! Il ne reviendra en effet dans "sa chère société" qu'en 1983 à l'appel de J.P. BOURRILLON et J. JONCKHEERE. Mais c'est une autre histoire... !


LES SORTIES EN CIRCUIT AUTOMOBILE par J.F LEBAU

 

Dès son retour des U.S.A., M. CASCUA chercha une formule originale pour relancer nos laques et réparation automobile. En effet, les séries DUXONE, AUROCH et D.L.R. avaient atteint leur développement technique, et pour les maintenir sur le marché en attendant l'arrivée de la nouvelle génération de produits en préparation dans les laboratoires, il fallait leur donner un vigoureux coup de fouet de promotion commerciale.

Le secteur « Carrosserie » qu'il dirigeait était divisé en « Régions » avec chacune un responsable local: M. LOSFELD pour le Nord, P. PAYER pour l'Est, HARDOUIN pour l'Ouest, A. MORGANA pour le Sud-Est, A. COURTESOLLE pour le Sud-Ouest et A. SANTELLI pour la grande région parisienne. (C'est lui qui succéda à M. CASCUA en 1975). Quant à J. LE GOFF, il avait en charge les concessionnaires Peugeot et Citroën.

De là naquit l'idée de mettre en place une action décentralisée. Chaque chef de région fut invité à réunir ses meilleurs clients, mais où ?

Pourquoi pas sur un circuit automobile ?

Ce fut plus difficile à faire qu'à dire !

D'abord, cela réclamait une grosse organisation pratique, la réservation des circuits, la présence de champions de la spécialité, mais, quand M. CASCUA a une idée dans la tête... !

De grandes manifestations sportives ont donc eu lieu au Castelet, à Magny-Cours et au Mans avec des pilotes émérites: J.P. JAUSSAUD (qui gagnera les 24 heures du Mans en 1978 et 1980), COURAGE, SEGUIN, J.P. BELTOISE, et J. LAFFITE.

Les « bolides » -des Formules 3- passaient d'abord à l'usine où ils étaient entièrement peints et décorés avec notre LOGO. C'étaient des véhicules à deux places: un baquet pour le pilote, et un siège pour le passager. Le jour de la réunion chaque « bon client » sélectionné, après avoir revêtu une combinaison et mis le casque réglementaire, pouvait s'installer à côté du conducteur et vivre une belle émotion: deux tours de l'anneau de vitesse, comme s'il participait à un grand prix !

DUCO circuit Paul Ricard DUCO sur circuits

Le circuit Paul Ricard au Castellet

Les jambes étaient parfois flageolantes au terme de cet exercice !

La réussite fut présente partout et les participants en gardèrent un souvenir marquant. Une fois cependant... !

C'était au Mans. Là comme partout, nous avions souscrit une assurance spéciale pour la durée des démonstrations qui devaient se terminer à 18heures. Vers 17heures 50, R. ARNAULT -notre Agent général du secteur « Industrie »- veut absolument faire plaisir à un de ses meilleurs clients et sollicite pour lui l'autorisation de faire un dernier tour de circuit.

A 18heures, la voiture n'est pas rentrée! L'attente interminable se poursuit... 18 heures 05, puis 18 heures 10. Toujours rien. B. BRUNEAUX et moi, responsables de la sécurité de nos clients, commençons sérieusement à nous inquiéter. Notre angoisse prendra fin cinq minutes plus tard quand la voiture arrivera au stand.

« Rien de grave » nous dira le pilote, « une embardée dans un virage, suivie d'un tête à queue... la routine »! Ce ne fut peut être pas l'avis de son passager qui avait dû connaître la frayeur de sa vie!

Malgré tout, ces manifestations marquèrent fortement et nos clients et nos concurrents !

L'avenir du secteur "Carrosserie" semblait assuré au moins... provisoirement.

 


LES SECTEURS "ANNEXES"

 

L'Automobile - Constructeurs et Carrosserie - représentait un gros secteur d'activité, mais d'autres produits étaient mis au point pour des domaines bien différents comme l'industrie du bois, l'électroménager, le bâtiment.

Les peintures en poudre commençaient à être commercialisées et la Société faisait des tentatives louables pour favoriser l'exportation de certaines de nos fabrications.


LE LABORATOIRE "BOIS" par J.F. LEBAU

 

Le bois est un matériau vivant.

Ce slogan de Dupont de Nemours doit toujours être présent à l'esprit du metteur au point des produits fabriqués pour ce support.

Mes exposés pour notre clientèle ou nos stagiaires commençaient immuablement par cette phrase tant elle a d'importance. C'est d'ailleurs un sujet de gentille moquerie de mes petits-enfants, quand il m'arrive - et c'est fréquent !- de prononcer le mot bois.

Ce département « vernis et laques » n'a malheureusement jamais connu le développement qu'il méritait à mes yeux. Et pourtant, la nitro-cellulose, déjà utilisée comme matière première dans l'automobile (FORD 1920), va remplacer l'huile dans les vernis pour le bois, et de ce fait, en permettant un séchage très rapide, autoriser l'apparition de chaînes industrielles: une révolution!

Dès 1928, la Société bénéficie des formules transmises par Dupont de Nemours, mais il faudra attendre l'après guerre et le début des années 50 pour que, sous la houlette de M. HELLER, un véritable laboratoire de mise au point soit créé à Stains, dirigé par M. BOYER. La gamme va des bouche-pores aux vernis à brillant direct, ou à poncer et polir, avec un fleuron (le fameux IF 2264 pour les intimes") produit à 100 tonnes par mois !

Pourtant le secteur "vivote" du vernissage des ébénisteries de téléviseurs en noyer, acajou ou palissandre, ou des... cercueils !

A ce propos, je ne résiste pas au plaisir de vous raconter la petite anecdote suivante : -Les « Pompes funèbres »  d'Aubervilliers étaient un client important. Un jour, un de ses chefs d'atelier arrive à Stains, catastrophé et demande à voir M STERN - le joyeux Charly- du Magasin « Réserve ».

"Je manque de vernis cellulosique. Il m'en faut d'urgence pour terminer une commande ». Mais, pas de stock disponible. On m'appelle à la rescousse pour savoir, si par hasard, je ne dispose pas d'un peu de ce produit au laboratoire. C'est oui; le client est dépanné. Et ravi, en quittant M STERN :

-« Si vous avez besoin de nos services, je vous ferai un prix, et même j'y ajouterai un petit coussin de soie sous la tête!!! »

Inconscience ou humour macabre? J'ignore d'ailleurs s'il a tenu sa promesse !

La recherche du gros client devient vite un désavantage quand on le perd !

Pourtant, en 1957, M. DELACUISINE réussit l'exploit de démarcher la Société « VALERI » qui traite le matériel de PHILIPS, RADIO-TECHNIQUE et RADIOLA. Avec des commandes de 60 tonnes par mois, elle devient le deuxième client (derrière SIMCA), de notre Société.

C'est alors que des produits révolutionnaires vont arriver d'Allemagne: les Polyesters, très garnissant, très brillants, et les Polyuréthannes à la durabilité extraordinaire, employés aussi bien pour les parquets que pour les bateaux. Avec de nombreux collègues ingénieurs: MM. AUSSEDAT, LEMERCIER, ODENT, puis M. MORISOT, nous tenterons, en vain, d'enrayer la progression allemande sur le marché français durant cette période.

En 1955, notre amis M. THEURILLAT avait mis au point une série « teintes pour bois » pour aider au développement du secteur, sans grand succès. Il partira d'ailleurs trois ans plus tard, pour créer sa propre entreprise, commercialisant ses produits sous le nom de « THELIA ».

Enfin, le bois va subir un assaut important de la part des matériaux composites autrement dit des « plastiques ».

Nous essayons malgré tout de tenir le cap avec M. COJEAN, Mmes NEUMANN et DEVEZ et d'excellents représentants - démonstrateurs: MM. FOULON, VALLÉ, FEHRNBACH.

C'est avec de la peine qu'en 1971, je quitte un laboratoire à la mort annoncée! Je vais alors succéder à MM. BESANCON et GEYSKENS à l'atelier « Démonstration » pour l'industrie et la carrosserie et créer « l'école-service » à la demande de M. CASCUA. Cette nouvelle tâche, au demeurant passionnante, m'éloigne pas mal du bois, mais ce domaine gardera à tout jamais une place à part dans mon cœur!

Au cours des quinze années qui vont suivre, je vais recevoir à Stains plus de 1500 stagiaires: agents techniques, démonstrateurs, agents des concessionnaires ou les personnels de nos distributeurs. De nombreuses conférences, regroupant parfois jusqu'à 600 auditeurs-clients, vont m'amener très souvent en province au cours de ces années là ; en particulier pour les « Salons-Carrosserie » dont nous reparlerons. Et puis, ce fut un départ sans douceur en 1987. Il ne faut pas sombrer dans la mélancolie pour autant, mais mettre notre énergie à faire survivre notre Chère vieille Société au travers de notre Association.

Mais pour combien de temps encore...!


LE SECTEUR LM.F. (Industrie-métal four)  par Mme P. CHARRON

 

Cette grande division s'occupe de la mise en peinture de tout le matériel métallique (hors automobile) par un revêtement qui doit subir une cuisson à haute température.

Une des branches importantes de son activité est l'électroménager qui a été à l'origine de la création de ce laboratoire.

Dans le passé, les appareils ménagers: cuisinières, gazinières, fours étaient revêtus d'une couche d'émail. Cet émail, toujours blanc, était pulvérisé en forte épaisseur sur le métal chaud, puis cuit dans des fours à 800 – 850°. Très résistant chimiquement, il était malheureusement très fragile mécaniquement. De plus, les énergies thermiques mises en jeu étaient considérables.

Le fort développement de l'équipement ménager dans les années 60 : réfrigérateurs, machines à laver, amena la Société à s'intéresser à ce nouveau secteur, et à mettre au point des peintures adaptées, en profitant de ses connaissances dans l'automobile.

A l'origine, le laboratoire fut brièvement dirigé par M. HELLER, puis par M. SAISON son adjoint, assisté de M. J. BERTEAUX. Ensuite, c'est M. ANDRIEU qui dirigea le service pendant quelques années. De 1970 à 1980, H.BOHNERT, J.SANSON et M. ROUSSEAU en auront la charge. M. P. DOHIN quant à lui assura la continuité en tant qu'agent technique, assistant de notre clientèle. Enfin, tout au long de cette période, le service commercial correspondant sera animé par M.P. CHANTIER.

Le laboratoire LM.F. avait deux domaines principaux d'activité. D'une part, l'électroménager proprement dit et d'autre part le mobilier métallique et les accessoires : portes, cloisons. Les cahiers des charges étaient rigoureux et la mise au point de laques adhérant directement sur le métal posait de nombreux problèmes. Ce sont des peintures à base de résines acryliques qui répondirent le mieux aux exigences de nos principaux clients, comme THOMSON.

Après quelques années, la nécessité d'augmenter la production et la rentabilité va bouleverser ce bel équilibre en introduisant les chaînes industrielles avec application automatique en système électrostatique.

Il fallut donc prendre en compte de nouveaux paramètres pour adapter nos peintures à cette nouvelle technologie. C'est à cette époque que les peintres en combinaison blanche disparurent des chaînes devant l'automatisation accélérée! Pour respecter ces nouveaux critères, il fallait trouver une solution de remplacement aux peintures acryliques qui ne pouvaient plus suivre la cadence. L'aide du Laboratoire « Résines » dirigé par M. A. CAHN nous fut alors précieuse pour formuler de nouveaux revêtements à base de "polyesters" à fort extrait sec.

Les premiers essais industriels eurent lieu chez THOMSON à Lesquin, le grand constructeur de réfrigérateurs. Ils s'étendirent ensuite à l'ensemble du secteur, sur les machines à laver le linge, la vaisselle, ainsi que sur les congélateurs, les cuisinières ou les fours en tout genre.

En ce qui concerne le mobilier métallique et les accessoires, l'évolution n'eut pas, et de loin, la même amplitude. Pour les portes ou les cloisons, chez K.Z. par exemple, c'était toujours la "bonne vieille" laque glycérophtalique qui donnait les meilleurs résultats. Les problèmes n'étaient pas absents, malgré tout, mais les réclamations concernaient surtout l'aspect satiné obtenu -critère difficile à maîtriser- ou la couleur, ce qui nécessitait alors l'appui du Laboratoire dirigé par Mme. J. JONCKHEERE. Grâce à son efficace collaboration, nous avons ainsi pu, en fabriquant par 20 tonnes à la fois, assurer la production d'HAUSERMAN, notre principal client dans ce secteur! C'était l'équivalent d'un Constructeur Automobile!

C'était l'époque de notre apogée! La suite fut moins brillante. Malgré de gros efforts, sous la forte poussée de la concurrence, nous allons perdre nos plus gros clients, sans pouvoir les remplacer par d'autres. Le service LM.F. électroménager, un peu à l'image de toute la Société va sombrer peu à peu, jusqu'à cesser complètement toute activité.


LES PEINTURES EN POUDRE

 

Une peinture sans solvants, qui n'a pas l'aspect liquide mais se présente sous la forme d'une poudre fine, voilà bien une idée qui avait le don de déclencher un sourire dubitatif (voire narquois) avant les années 60, et pourtant...!

Ce mode de revêtement particulier demandait bien sûr de gros efforts d'innovation dans le domaine de sa fabrication, et une avancée technologique considérable dans celui de son application.

Chez DUCO, MIe. CAILLAUX et M HAEGELI en véritables pionniers, avaient compris que cette évolution dans le métier des peintures allait être une révolution et un moyen important de lutter contre les nocivités et la pollution engendrées par les peintures liquides classiques et leurs solvants.

Mais, que de chemin à parcourir avant de parvenir à une production industrielle vers 1965 - 1966 !

A Stains, c'est M. H. VANSPEYBROECK qui fut engagé pour diriger une unité pilote d'abord, puis, plus tard, un atelier industriel avec l'assistance de M. HOGG ainsi que MM. COJEAN (venu du "bois"), CAMPOURCY, DELOUIS, RIFLET, et ROQUES (transfuge de l'électrophorèse).

DUCO a eu une bonne part du marché dès le démarrage industriel, vers 1969, de cette peinture "propre". Surtout dans la famille des époxydiques, un peu moins pour les polyesters ou les polyuréthannes.

La production européenne va doubler en cinq ans (de 1975 à 1980) passant de 20 000 à 40 000 tonnes par an, pour stagner un peu ensuite et n'atteindre que 60 000 tonnes par an en 1990.

La technologie très particulière à ces peintures fait que seules des sociétés spécialisées réussissent à s'implanter et à monopoliser le marché. C'est le cas de BICHON (BECKER), POLYDROX (VOISIN), COURTAULD (CROMADEX), au détriment de DUCO qui peu à peu va perdre ses clients.

Il nous restera d'avoir été les tout premiers à croire à cette peinture "moderne" qui représente pour l'avenir, un moyen efficace de lutte contre la pollution.

 

LES GRANDS MARCHES

 Il s'agit surtout des grandes administrations: la S.N.C.F., les P.T.T., L'AVIATION, les TRAVAUX PUBLICS ou la MARINE.

Dans les années 50, Mademoiselle M. CAILLAUX, alors directeur technique, avait demandé à ses laboratoires de formuler des produits que réclamaient les commerciaux: M.M. ABBATI et VASSEUR qui voyaient un débouché intéressant dans ces secteurs.

 

LA S.N.C.F.

 M. RIGNEAULT, dont l'épouse était secrétaire de M. DUCHE était le responsable du service commercial. Le laboratoire était lui dirigé par M. H. ALBA assisté de M. C. HOVELAQUE jusqu'au début des années 60 où il fut remplacé par M. J. LE SERRE. Leur succédèrent ensuite M. A. MORISOT, puis M. J.C. GRUNINGER avec M. C. ROQUES.

Les peintures devaient satisfaire à de nombreux tests d'homologation, et de plus, ne comporter aucun hydrocarbure benzénique dans leurs compositions.

C'était un marché important, mais dans lequel les prix devaient être particulièrement tirés! Et de grandes sociétés étaient sur les rangs: Blancome, Valentine, Ripolin ou la Seigneurie.

Les voitures -à l'usage exclusif des voyageurs- et les wagons, pour le fret, étaient traités dans des usines telle ALSTHOM, en peinture glycérophtalique à l'origine, puis en acrylique et surtout polyuréthanne. Le célèbre T.G.V., quant à lui, sera réalisé en finition « bi-couche » avec un vernis polyuréthanne en finition.

Mais la concurrence est rude et les parts de gâteau de plus en plus difficiles à obtenir. Malgré tous les efforts commerciaux déployés par M.D. FERRY, venu de chez Guittet en 1970, nous resterons toujours très en deçà de nos espérances dans ce domaine.

 

DUCO et TGV 

 

 LES  P.T.T.

 Voilà un marché où il était bien compliqué d'obtenir des homologations.

Il fallait d'abord avoir d'excellentes relations avec le Directeur technique des P.T.T., ce qu'avaient réussi à faire M.M. LEBAU et LEGOFF, mais comme en définitive, c'était le responsable de chaque centre régional qui avait la décision du choix du fournisseur, la partie n'était jamais gagnée d'avance. Cette méthode multipliait d'autant les problèmes posés à notre laboratoire "colorimétrie" et Mmes. 1. JONCKHEERE et H. CHAROFF ont du bien souvent déployer tout leur talent pour nous assister sur ce point. Le célèbre « jaune P.T.T. » est un exemple bien connu, de même que le fameux bleu "France- Télécom" qui lui, n'existait pas moins qu'en 17 nuances différentes selon les fournisseurs et les fabrications!

Là encore, les résultats se révélèrent décevants face à la somme de travail fourni.


 L'AVIATION

 Un titre de gloire! Nous avons été le premier fournisseur de peinture de l'aviation civile dès le début des années 30. Grâce aux formules Dupont de Nemours, DUCO peignait les avions en toile à l'époque en cellulosique.

Notre adaptation aux avions modernes fut hélas, moins réussie. Les Anglais et les Allemands eurent l'apanage de ce marché.

Il faut cependant signaler que, si "Concorde 00 1" nous a échappé, nous avons obtenu de peindre le "002" !

Bien maigre consolation !

DUCO et Airbus DUCO Airbus
Mise en peinture de l'AIRBUS



  LES GRANDS TRAVAUX

 
Il ne s'agit pas, bien sûr, de ceux d'Hercule, mais des "Travaux publics" ou des "Chantiers Navals". La Seigneurie obtiendra l'entretien de la Tour Eiffel: 50 tonnes de peinture tous les 7ans, et la "Marine", mais nous ne serons jamais des spécialistes dans ces domaines où les Italiens règnent en maîtres.

Une anecdote, au passage, grâce aux contacts personnels de M. H. HARDOUIN, nous avons réalisé la peinture polyuréthanne du voilier de MALINOWSKI. C'est assez peu!

En conclusion, on peut dire que la diversité de choix de notre Société dans ces secteurs ne pouvait que conduire à l'échec. Le manque de cohérence ou de volonté, la constante remise en cause des personnes et le changement perpétuel de responsables, tout cela ajouté à la difficulté du "terrain", explique en grande partie la décadence de la Société dans ces divers secteurs comme dans d'autres, hélas!


DUCO ET L'EXPORT par G. LANOIS

 Ce département qui aurait pu réaliser de grandes choses fut malheureusement ballotté au gré des P.D.G. qui se succédèrent chez DUCO. Son responsable était assis sur un siège éjectable avait-on coutume de dire, et pourtant, j'ai occupé la fonction pendant 24 ans!

Je débute en 1966-1967 au laboratoire de recherche et de développement chez « Peintures internationales » avec M. J.C. GRUNINGER. Je terminerai les années 60 chez LEVASSEUR, filiale de DUCO.
 

L'Espagne - 1970-1973

Pour de subtiles raisons financières de subventions, d'exemption de taxes d'importation des matières premières ou de produits semi-élaborés, DUCO va faire fabriquer des tonnes de base blanche glycérophtalique par la Société MONCLAR. C'est alors qu'arrive M. M. JUSSMAN. Pour des motifs que lui seul semblait connaître, il décide du jour au lendemain de supprimer cette antenne espagnole en reprochant à son directeur M. REGAS, son manque de rentabilité.


La Grèce - 1973-1982

Cette filiale, VECHRO S.A est baptisée par les mauvaises langues fabrique de peinture pour "Cabanes" ! On y produisait pour le bâtiment, les industries diverses ou la signalisation routière. En 1977, avec l'appui technique de M. J. SANSON, on livrera même à ISOLA, le fabricant de matériel électroménager. C'était un gros marché qui sera honoré jusqu'en 1982. Là, DUCO cède cette filiale à M. DERGENDE, homme peu efficace qui ne pourra redresser la situation que grâce à l'arrivée de M. HATZI NICOLAS, mais sans nous hélas !

L'Egypte

Nous y tentons une implantation sous l'impulsion de M. J.C. MAILLET en 1982. Ce sera un épisode sans lendemain.


De 1982 à 1988

M. MAURETTE veut créer un service export pour la réparation automobile avec des filiales à l'étranger, en Grande-Bretagne, au Moyen-Orient, et même en Afrique noire francophone.

Pendant près de dix ans, grâce à un accord avec la Seigneurie et Valentine, le marché de la Côte d'ivoire, du Gabon, du Cameroun et du Sénégal nous est ouvert. En Grande-Bretagne, S.F.D./G.B. travaille avec la Société KALON qui va bientôt passer dans le giron des Suédois.

Enfin, en 1988, et malgré les efforts de M. J.P. BOURRILLON, le secteur carrosserie, fleuron de la réparation automobile, sera livré au repreneur Dupont de Nemours qui s'empressera de donner nos formules et notre technologie à KALON !
 

Et le Moyen-Orient ?

Une petite filiale a bien vu le jour en Israël avec la complicité de M. WEISSMAN, le frère du patron de BLANCOME. Comme toutes les autres tentatives, elle était vouée à l'échec par le manque de cohérence, de volonté des P.D.G. qui se sont succédés au cours de cette période. Les tribulations du service "Export" sont bien difficiles à comprendre et pourtant il aurait pu avoir un grand avenir.

La mariée n'était peut-être pas assez belle !


LA SOCIETE GUITTET  par C. JEAN

L'histoire d'une société commerciale est toujours en rapport avec le besoin, l'argent et le génie créatif de l'homme.

En 1840, Victor GUITTET se rend compte que Marseille, touché par une épidémie de peste, ne produit plus suffisamment de savon. Il va donc créer une petite entreprise dans la région du Mans pour en fabriquer. Il y adjoindra bientôt le siccatif dont la formulation chimique est proche et dont se servaient les peintres pour améliorer le séchage de leurs préparations à base d'huile de lin. Le siccatif "soleil" était né ! Il sera connu dans toute l'Europe et servira d'emblème à la société.

Mais c'est son fils Georges, chimiste de valeur, qui va vraiment lancer la Société GUITTET.

Il étend le domaine de sa production aux vernis et aux peintures partout, avec une usine à Londres et une autre à Saint-Petersbourg. Il anticipait la décentralisation! Mais le siège social était installé rue de Paradis, en plein 10ème arrondissement à Paris.

La guerre de 1870 va entraîner de profonds bouleversements; le siège déménageant rue d'Hauteville, et l'usine principale quittant la proximité de Paris à cause de la démolition des fortifications, mais aussi parce que la cuisson des huiles à feu nu dans de grandes cuves de cuivre polluait l'environnement!

Ce sont des terrains achetés à bon marché sur la commune de Montigny-LèsCormeilles qui permirent d'installer la toute nouvelle usine au milieu des champs et des bois et en bénéficiant d'une main d'œuvre peu exigeante.

C'est M. Paul GUITTET qui dirige alors l'entreprise. La guerre de 1939-1945 va, elle aussi, venir perturber la bonne marche de la Société, et c'est son fils Claude qui va, au début des années 1950, redynamiser la déjà vieille maison familiale, avec l'aide d'un adjoint de valeur: DUPRE-LATOUR. Les ventes vont se faire maintenant par un important réseau de grossistes. Cette politique demande un gros effort financier, et c'est pourquoi "GUITTET" va ouvrir son capital à "DUCO" en 1956, qui deviendra d'ailleurs majoritaire quelques années plus tard, tout en restant sous la présidence de M. Claude GUITTET.

C'est l'époque où M. LANTHONIE dirige l'usine avec M. NETILLARD aux Services Techniques. Ce dernier sera "échangé" avec M. POULAIN de Stains, au milieu des années 1960.

Des produits "haut de gamme" : l'ORION brillant ou mat, le MAT 78, entre autres sortiront à ce moment là. Ils sont toujours présen s sur le marché actuellement !

Et puis, les événements se précipitent. En 1974 GUITTET est absorbé par DUCO. En 1977, « DUCO Bâtiment », Eurocolor et Guittet fusionnent commercialement et s'installent dans des locaux neufs à Saint-Ouen l'Aumône, où se trouve aussi le dépôt central des produits fabriqués par Montigny.

L'usine cessera son activité en 1982 et M. Claude GUITTET quittera ses fonctions, remplacé par M. P. BAGOT, Directeur "Bâtiment" de la branche peinture du groupe, appartenant désormais à C.d.F. Chimie.

En 1989, C.d.F. regroupe à la tour Aurore à la Défense, les différents réseaux administratifs et commerciaux auxquels appartient Guittet, mais qui va rapidement, dès 1990, se retrouver dans la division peinture de "TOTAL". En 1993, la direction commerciale rejoindra le siège de "La Seigneurie" à Bobigny. Puis TOTAL va regrouper l'ensemble de ses marques à la tour DIAMANT à Puteaux la Défense. Le rachat d'ELF-FINA par TOTAL va adjoindre au groupe les marques SIGMA - GAUTHIER qui siègent à Rueil-Malmaison, que vont rejoindre alors les services administratifs et commerciaux de la Seigneurie et Guittet. La branche "RIPOLIN - Grand public" et AVI sera installée à MOREUIL, près d'Amiens. GUITTET est désormais une marque de l'entité SIGMA - KALON EURIDEP.

L'entrepôt central de Saint-Ouen l'Aumône fermera définitivement ses portes en1998 !

Mais le "Soleil" brille toujours sur la marque GUITTET !


STONER, "UNE USINE DANS L'USINE" par G.NEUMANN

La Société Française Stoner Mudge - la S.F.S.M - à sa création, vers 1945 appartient à 51 % aux Américains: M STONER le technicien, M MUDGE, le financier, et 49 % à la Société DUCO. M M DUBIEN en est le PD.G et M J. PETRY le directeur. MM M PERRIER et BOSQUILLON complètent l'équipe d'encadrement. En 1957 arrivent en renfort M J STORCK, pour un bref passage, et M G NEUMANN à qui nous laissons le soin et le plaisir de nous parler de la société qu'il a connue du début, presque, jusqu'à la fin.

Pour assurer sa production, Stoner dispose de locaux et de matériels de la Société DUCO.

Sa spécialité est le revêtement pour les emballages métalliques. Qui ne connaît la boîte de petits pois, la capsule du pot de confiture, ou le couvercle à ouverture facile? La grande majorité des boîtes est traitée à l'intérieur, moins à l'extérieur qui n'est souvent que recouvert d'une grande étiquette en papier qui en fait le tour. Les supports sont principalement le fer blanc qui est un acier recouvert par électrolyse d'une fine couche d'étain, et l'aluminium. Quant à la mise en peinture, elle fait appel à une technique très particulière: un rouleau cylindrique enduisant directement des feuilles plates de métal, comme en imprimerie. C'est d'ailleurs sous ce nom qu'est désigné l'atelier! Les revêtements sont ensuite polymérisés dans des fours à haute température, et à cadence élevée, les feuilles de fer blanc peintes, presque à la verticale, reposant sur un "peigne" et circulant sur un tapis roulant.

L'aluminium, lui, est enduit en continu à partir de grosses bobines qui se déroulent sous tension.

Ce n'est qu'après la sortie de "l'imprimerie" et découpe par des presses que les fonds, les capsules ou certaines boîtes vont être formés par emboutissage. Ceci exige donc des revêtements à la fois souples et adhérents pour permettre ces opérations mécaniques. Si l'on ajoute que les récipients pour denrées alimentaires vont subir en plus une stérilisation en autoclave, il devient évident que nous abordons un domaine technique très spécial !

Les résines utilisées dans les formulations amènent à des produits très chers, mais les couches appliquées sont très minces. Dans le cas d'un vernis or pour boîtes de légumes de 425ml, un bidon de 25 litres permet d'en réaliser 43 000 !

L'atelier, dirigé par M. J. FATOUX, doit répondre rapidement aux commandes. La plupart des produits: vernis incolore ou or ne demandant pas de mise à la teinte, sont toujours fabriqués en moins de 3 jours. En revanche, de nombreux contrôles sont réalisés pour obtenir la qualité exigée.

Le nombre de clients était assez restreint, mais c'étaient des noms importants: Carnaud, Ferembal, Rhénalu, Massilly ou encore Le Bouchage mécanique. Dans ce contexte, nous n'avions pas besoin de représentants, mais d'une excellente relation entre nos services techniques et commerciaux respectifs, et d'une intervention rapide sur le terrain le cas échéant. Nous invitions d'ailleurs certains responsables à effectuer un petit stage formateur à l'usine pour constater le sérieux de nos méthodes de fabrication, la puissance de nos appuis chez DUCO. Il en résultait par la suite un climat de confiance amical.

 

STONER À L'ÉTRANGER

Stoner exportait aussi quelques uns de ses produits. Vers la Suisse et l'Italie d'abord, puis vers la Grèce et le Portugal. Un ingénieur, M. J.J. BOOS, fut d'ailleurs recruté à cet effet en 1962. Il reçut aussi la mission de vendre en Allemagne et en Pologne, où il arriva à placer d'assez gros tonnages. Un accord avec une société hollandaise installée à TIEL nous permit de prospecter dans leur domaine, le Bénélux et l'Europe du Nord.

M.M J. PETRY et J. STORCK étant rapidement partis chez DUCO pour y occuper des postes importants, il fallut bien recruter des renforts. Ce fut M. P. POULARD d'abord en 1959, puis M. P. LEROY par la suite, M. M. PERRIER demeurant Directeur jusqu'à sa succession assurée par M. J.J. BOOS.

En revanche, au laboratoire, l'équipe demeura longtemps fidèle au poste comme M.Mmes H. SANTENS et J. DUFOSSE, M. G. LAGRANGE ou M et Mme D. et G. RICHARD.

A la mort tragique de M. J. FATOUX, c'est M. A. CERVONI qui prit la direction de l'atelier pendant que son épouse s'occupait du secrétariat à l'exportation. C'est M. J.P. BOURRILLON qui était notre P.D.G. quand DUCO-STAINS cessa ses activités. Stoner dut alors déménager dans l'usine d'Arpajon où elle disposa d'un atelier et d'un matériel un peu plus moderne. C'était en 1986 ; cinq ans plus tard, rachetée par B.A.S.F., elle partit pour Clermont-de-l'Oise. Depuis l'origine, S.F.S.M. était passée, côté français, sous la coupe de Roussel-Nobel, Charbonnages de France, AKZO-Nobel, et côté américain: Martin Marietta, Mobil Chemical, Valspar et finalement B.A.S.F. qui, unique propriétaire, n'eut même pas le droit d'exploiter toutes les formules de la Société !

 Bien des évènements ont marqué cette période de 36 ans ! Permettez-moi de vous en rapporter quelques uns sans y attribuer de valeurs particulières.

C'est ainsi que, curieusement, M. Serge TCHURUK, actuel P.D.G. d'Alcatel fut deux fois administrateur de S.F.S.M., du côté U.S. pour Mobil, et quelques années plus tard, côté français pour C.d.F. !

 

DUCO le labo gare

Notre laboratoire était installé dans un bâtiment qui ressemblait plutôt à une petite gare de province. C'était là que M. V. RENELLE avait commencé sa carrière chez DUCO. D'ailleurs, une plaque commémorative à la mémoire de ce grand résistant était fixée sur la façade. C'est là aussi qu'une secrétaire "prêtée" par DUCO, venait s'installer de temps en temps.

Ce fut d'abord Mme S. SIMEAN, puis plus tard, Melle J. VOISIN, au caractère pas très facile, qu'on était tenté de traiter « d'empoisonneuse » en référence à son homonyme, qui,sous Louis XIV avait été mêlée à un fameux scandale ! 

Mme E. ROUSSEAU, née DUPUIS, qui lui succéda en 1964 était sans doute bien différente puisque Mme PERONNE, la distinguée assistante sociale lui trouvait une ressemblance, rien que çà, avec « 'Ange au sourire » de la cathédrale de Reims du XIIème, siècle bien sûr, pas arrondissement de Paris, ajoutait-elle malicieusement.

Le Labo ressemblait à une petite gare

Les bonnes relations avec nos clients étaient souvent confortées par un solide repas agrémenté d'une délicate attention. Ainsi, avec un acheteur nommé BRION, M. PERRIER trouvait très subtil et bienvenu, de commander un cru « Haut-Brion » pour accompagner les mets!

M. J.J. BOOS, qui visitait la Pologne, pays de l'est, à cette époque, et qui avait comme interlocutrice une dame plus fonctionnaire que commerçante, savait lui faire plaisir en lui rapportant de Paris, des bas ou des collants. Mais, bien qu'ayant pris les plus grandes tailles, ceux-ci se révélèrent trop petits! La dame ne devait rien avoir d'une libellule!

Pour les "relations mondaines", M. PERRIER se dégageait en général sur moi. J'ai ainsi été très heureux d'assister à l'office de mariage de M. J. SAISON à Saint-Cloud.

Mais, c'est plus souvent aux enterrements de nos amis qu'il m'envoyait.

Aussi le chemin de la modeste église de Stains m'était-il familier.

A Saint-Sulpice, aux obsèques de M. DUCHE, la solennelle cérémonie parisienne était tout à fait dans le style « Grandes familles » de Philippe Hériat. ,

En revanche, à Béthune, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, pour l'enterrement du malheureux J. FATOUX, que son épouse avait tué dans une crise de démence, j'ai vu à l'œuvre la "Confrérie des charitables", en redingote et bicorne, qui, depuis une lointaine épidémie de peste assure le transport des cercueils des défunts.

Plus tard, c'est M. PERRIER lui-même que nous avons conduit à sa dernière demeure, dans le Morvan. Les cigarettes roulées dans du papier maïs, qu'il appréciait trop, n'étaient probablement pas étrangères à sa fin rapide.

Bref, la vie ne fut pas si mauvaise que cela sur les rives enchanteresses du Rouillon !

Les relations avec nos « cousins » de DUCO étaient bonnes. Nous avions même le droit, comme eux, et à nos risques et périls, de confier nos véhicules au service "Démonstration" pour des essais de peinture. C'est ainsi que je me suis retrouvé au volant d'une voiture d'un rouge éclatant, laissant croire aux foules admiratives que je faisais partie des sapeurs pompiers!

J'y ai même trouvé -et gardé- de solides amitiés, dont celle d'un garçon très cordial et sociable, du Laboratoire « Bois » -J.F. LEBAU- je crois - qui collait des gravures sur de petites planches, les recouvrait de vernis, réalisant ainsi de très jolis tableaux qui ornent encore ma demeure!

Enfin, n'oublions pas le service de fourniture de peinture à prix réduit pour le personnel, les « R.A.D. » si appréciés qu'ils ont donné leur nom à notre sympathique « Association d'Anciens » !

 

LE GITE ET LE COUVERT par R.DUFLOS

 La Société disposait de nombreux appartements en location, si bien que tout nouvel arrivant trouvait facilement à se loger et à proximité de l'usine. Heureuse époque!

De plus, face à l'entrée principale, un petit bâtiment pouvait accueillir, dans les étages, les célibataires hommes endurcis dans de modestes chambres individuelles. Au-dessous, c'était le domaine de M. ESCOFFIER qui gérait de main de maître notre Coopérative maison, puis Paris-Ouest ensuite. C'est là aussi qu'il distribuait les fournitures et la peinture pour le personnel.

A côté de l'entrée, un autre bâtiment était occupé à l'étage par Mme. NEUMANN. Très mélomane, et musicienne, -elle jouait fort bien de l'harmonium- elle offrait au voisinage de petits concerts par les fenêtres ouvertes, les beaux soirs d'été!

La grande pièce du rez-de-chaussée servait de salle à manger pour les ouvriers apportant leur gamelle, pour les courageux qui ne craignaient pas de manger le soir, le même menu que le midi! C'était le temps du plat unique!

 

DE LA "CANTINE" au "RESTAURANT D'ENTREPRISE"

 A l'origine c'est Mme. MOREAU qui était la grande prêtresse du service ou tout se passait comme au pensionnat ou à la caserne!

Il fallait d'abord impérativement compléter les tables à huit. Seulement alors les serveurs passaient dans les allées de ce réfectoire avec les chariots chargés de grosses marmites. Celui qui faisait office de chef de table passait les assiettes qui se retrouvaient rapidement remplies d'une louche de viande, d'une autre de légumes, et d'une plus petite de sauce. C'était le service collectif au choix réduit !

Le personnel d'encadrement, peu nombreux car préférant "l'annexe" du café AUROY, voisin, était servi de la même façon, mais dans une pièce à part. Un premier changement eu lieu en 1964/65 quand M. BOUGEARD s'occupa de la restauration.

On put alors se servir individuellement au plateau avec un choix convenable de plats. Les "cadres" mangeaient toujours à part, choyés par une nouvelle recrue: Mme. CAILLE (Hélène, la belle!). Et puis ce fut la révolution de mai 1968 et la création du Restaurant d'Entreprise.

Grand choix d'entrées, de plats, de desserts et de boissons, réglés à l'aide de coupons qu'Hélène collectait avec le sourire.

La petite salle à manger fut transformée pour pouvoir recevoir les invités de la Direction, les clients importants, sous la responsabilité d'Hélène, toujours elle, et qui contribuera bien souvent à améliorer les relations commerciales au cours de ces repas par son amabilité et sa gentillesse.

Dans les derniers temps, la salle de restaurant servit surtout aux "pots de départ" quand la Société éclata en morceaux. Quant à ceux qui restaient, on leur donna des "bons-repas" à négocier à la cafétéria du centre commercial voisin!

Malheureusement j'ose dire que cela sentait la « Fin des haricots » !

 

 

LA NEBULEUSE

(1980-1989)

par R. DUFLOS


C'est ainsi que X.M ABATTI avait prévu d'appeler cette dernière période. Nous avons décidé de garder ce titre. La nébuleuse peut être considérée comme un amas d'étoiles plus ou moins brillantes, ce qu'avait pu être notre Société à une certaine époque qu'il avait bien connue. C'est aussi quelque chose de plus confus, des nuages menaçants, bref une situation peu claire dans laquelle il est difficile de distinguer l'avenir et d'organiser le présent. Il vivait cela de l'extérieur maintenant mais sentait bien que la fin de DUCO était proche et inéluctable.

Mon seul mérite est d'avoir vécu cette période jusqu'au bout. C'est à ce titre que j'en relate les principales péripéties.

Nous avons vu que le déclin de certains secteurs: « Bâtiment - Bois – Industrie », s'était déjà amorcé, celui des « Constructeurs » se maintenant, et la « Carrosserie » semblant, une fois de plus, la seule capable de relancer l'activité.

J.F LEBAU nous fera le récit des efforts importants consentis pour tenter de réussir ce pari ambitieux.

Mais avant tout, il fallait remettre de l'ordre dans le cahot qui régnait sous l'égide des Charbonnages de France, suite aux regroupements et restructurations divers. Les toutes premières années vont être fructueuses et faire renaître un fol espoir.

C'est essentiellement J. JONCKHEERE, Directrice de la Recherche, et J.P BOURRILLON rejoint par M. CASCUA au « Commercial » qui vont être les artisans de cette ultime tentative de redressement, au cours de laquelle, pour compenser les départs, furent engagés de nouveaux collaborateurs, jeunes et talentueux.

La répartition des différents secteurs d'activités du point de vue géographique complique sérieusement la tâche.

 

LES SERVICES TECHNIQUES.

 On retrouve au Labo-Nord, l'Industrie Générale, les Constructeurs, avec J.P TOURNILLON, M. GEYSKENS, M. SAUVAGET, et la Carrosserie. Mais aussi les « Résines » avec A. CAHN jusqu'en 1984 et les « Analyses » avec R. AUSSEDAT.

Dans l'usine même, le Poudres, le Bâtiment avec J.C DEZERT venu de Guittet-Montigny, et l'ensemble de la Colorimétrie.

Des locaux vont aussi être loués dans l'immeuble de la Société Hoëchst voisine pour installer un nouveau service étudiant des produits spéciaux comme les hydrosolubles, ou des applications sur les matières plastiques.

Enfin, le Matériel roulant, le Bois, le Coil-Coating sont à Arpajon.

 

LA PRODUCTION.

Elle se fait encore partiellement à Stains, mais aussi à Saint-André, à Ruitz et à Arpajon. La stratégie envisagée est de regrouper les forces de chacun des secteurs mais d'abandonner la fabrication de Stains car il est impossible de moderniser la vieille usine en raison des règles d'urbanisme en vigueur. Seule la partie proche du Rouillon peut être affectée à cette activité. En revanche, l'ensemble des services de recherche, de mise au point, de gestion informatique et de documentation, et le commercial, peuvent être recentrés, réorganisés à Stains.

Nous verrons que seule la première partie de ce plan sera réalisée. La suite, malheureusement, demeurera à l'état de projet !

Voilà plus de quinze ans que je suis chez les « Constructeurs » quand le départ rapide d'A. MALNOU de la « Carrosserie » amène J.P NETILLARD à me demander de rejoindre ce laboratoire pour y travailler avec Mme J. BROSSIER. La mise au point des nouveaux produits que DUCO veut lancer sur le marché doit, de plus, y multiplier les activités. Hélas, les moyens techniques font cruellement défaut. Tous les essais pratiques d'application doivent se faire dans le plus vieux des bâtiments de l'usine, celui-là même qui était déjà là en 1927 ! Appelé, pompeusement, Atelier de démonstration, et malgré quelques travaux de ravalement, ce local n'est plus en mesure de répondre à nos besoins. A peine peut-on essayer les nouvelles peintures sur des éléments de carrosserie de 2CV ! La cabine artisanale qui y avait été installée à l'intérieur à l'époque de M. BESANCON était depuis longtemps déjà démontée car ne répondant plus aux normes de sécurité. Et pourtant, il fallait bien faire avec les moyens dont nous disposions. La mise en peinture de véhicules devait se faire alors à l'extérieur de l'usine, par obligation, avec tous les inconvénients et impondérables que cela implique. C'était soit chez nos « cousins » de Valentine, soit chez un de nos distributeurs de la région parisienne. Avec le recul, cela parait aujourd'hui impensable!

Depuis des années, régulièrement, les responsables de ce secteur réclamaient une cabine digne de ce nom. L'importance des sommes à engager avait toujours fait reporter le projet à plus tard. Et puis, en 1981, le duo J. JONCKHEERE J.P BOURRILLON va arracher la décision auprès de la direction de C.d.F ! Un atelier complet, avec une cabine flambant neuve, allait être construit sur l'esplanade voisine du Labo-Nord!

Les conditions de travail changèrent du tout au tout. On pouvait maintenant peindre des véhicules dans les mêmes conditions - et bien souvent meilleures - que nos clients carrossiers pour qui étaient organisées de véritables séances de démonstration! Nous pouvions aussi envisager sereinement des stages de formation pour l'ensemble de la profession et surtout pour nos propres agents techniques qui allaient bientôt réoccuper toutes les régions de France. Le projet de relancer le secteur pouvait maintenant avoir les meilleures chances d'aboutir. C'est à cette époque -1983- que M. CASCUA va venir sérieusement renforcer et réanimer le secteur commercial. A la fin de cette même année, M. GILET sera embauché pour me succéder au laboratoire Carrosserie. Un an plus tard, c'est à C. DEVOT, venu de "Peugeot" que je cède la place à la tête de l'atelier-pilote d'application et de démonstration.

L'avenir semble s'éclaircir, au moins dans le secteur Carrosserie. Les projets dans ce domaine sont nombreux comme nous allons pouvoir en juger par l'activité déployée dans les "Salons" et "Rencontres internationales" qui vont être organisés.

Pour ma part, dégagé de mes tâches au Laboratoire Carrosserie d'abord, puis de l'atelier-pilote-peinture et de la formation pratique qu'elle impliquait, je pouvais contribuer à un important travail de réorganisation au sein de l'Administration des services techniques.


LA NOUVELLE ADMINISTRATION TECHNIQUE.

 Pendant cinq ans, une intense activité va régner dans ce secteur où chacun va faire des efforts pour maintenir en équilibre le fragile édifice en train de se construire. La grande animatrice était bien sûr J. JONCKHEERE. Elle suivait de très près la Production d'Arpajon, qu'elle placera plus tard sous la responsabilité de B. LECONTE, mais gardait la haute main sur son domaine de toujours: la Colorimétrie. C. KRASETZKI venu de chez Valentine l'assistait avec A. GUTKNECHT et H. CHAROFF fidèle collaboratrice des premiers jours. En 1984, A. CESARINI viendra compléter l'encadrement du secteur.

Dès sa nomination comme Directrice de la recherche, elle fut aidée par A. NEIRYNCK qu'elle chargea en particulier de la réorganisation de l'administration technique. C'est lui aussi qui, jusqu'à son départ en retraite en avril 1986, entreprit de mettre en place, au centre de l'usine dans le bâtiment de stockage des emballages neufs, les services techniques et annexes fort dispersés comme nous l'avons vu. Seule la première tranche de travaux fut réalisée, au rez-de-chaussée, l'arrivée de Casco-Nobel remettant, hélas, tout en cause!

C'est à cette époque qu'une première restructuration vit le départ de nombre de collaborateurs, une deuxième, baptisée du doux euphémisme de « plan social », fort à la mode, allait être fatale à notre vieille Société!

Au Secrétariat technique, je vais retrouver M. ZYGUEL -Maria, pour tout le monde-. Depuis plus de dix ans déjà elle assure avec une rare compétence le fonctionnement du service. Engagée par J.P NETILLARD, elle va tout apprendre de Marie GIACOMMELLO, et tout naturellement, en prenant sa suite devenir la secrétaire de J. JONCKHEERE.

Et l'informatisation commence à être mise en place un peu partout. Tout doit rentrer dans la mémoire des ordinateurs: les fameuses « banques de données » ! Tous les « codes », bien sûr, les formules de fabrication, les contrôles de la qualité, les fiches de données de sécurité, et bien d'autres choses encore. Tout doit être conforme et cohérent sur les différents sites de la Société. Par bonheur, M. DE MONTLAUR va se montrer excellent pédagogue et un collaborateur aussi précieux que patient pour nous aider dans ce domaine tout nouveau et bien particulier ! Pourtant, à la réflexion, tant d'efforts voués à l'échec, car manifestement la liquidation de la Société et surtout l'usine de Stains était programmée!

En quelques mois, les principaux secteurs d'activité vont être bradés. La Carrosserie sera « donnée » à DUPONT, la technologie, les clients et les meilleurs collaborateurs: M. GILET, C. DEVOT, J. LE NEN, M. LUND Y, Mme J. AMMAR et les agents techniques régionaux.

Les Constructeurs seront eux, récupérés par B.A.S.F. avec B. BRUNEAUX, J.P TOURNILLON, B. DELOUIS, C. LEFER, G. CAMPOURCY, F. CARRIL. Ils seront rejoints un peu plus tard par J.P BOURRILLON lui-même.


Les Poudres et le personnel technique vont se retrouver dans le Groupe VOISIN. Et pourtant, en octobre 1986, J. JONCKHEERE va encore embaucher deux jeunes ingénieurs de talent : Marie-Claude CLAVERIE pour seconder P. CHARRON à l'Industrie et au Bois en remplacement de R.COJEAN parti en retraite, et Christophe GRUAT, pour le secteur « Pigments-Procédés de fabrication » pour compenser les départs de B. LECONTE et C. KRASETZKI.
Christophe Gruat  Christophe Gruat


Leur présence parmi nous fut courte, hélas pour eux! Dommage, car ils auraient eu « l'esprit DUCO » ces deux-là! Ils se retrouveront à la Seigneurie avec le "Bâtiment" avant de poursuivre une brillante carrière chacun de son côté!

La production, enfin ce qu'il en reste, se fait maintenant à Arpajon, sauf en ce qui concerne les Résines spécifiquement « maison » qui sortiront toujours, et jusqu'au dernier moment de nos ateliers de cuisson de Stains avec J. MAUBERT.

Pour rassembler l'ensemble des services techniques encore en activité, la nouvelle direction décide de construire un bâtiment pour les accueillir à Arpajon. C'est une véritable usine à gaz faite de grilles et plaques métalliques, de tubulures, de parois vitrées, l'ensemble des murs et des cloisons étant recouvert d'une peinture aluminium. C'était, sans aucun doute, futuriste, mais sans avenir!

En ce qui concerne Stains, il fut décidé que le site serait définitivement fermé pour le mois de mai 1989.

 

DUCO labo Arpajon
DUCO labo

Les Laboratoires d'Arpajon

Une véritable usine à gaz....
DUCO Lab Arpajon
DUCO labo Arpajon
faite de grilles metalliques, de tubulures....
et quelles paillasses
 

 

LES REUNIONS INTERNATIONALES

LES SALONS DE L'AUTOMOBILE

par J.F LEBAU

 

ous sommes au début des années 80. La Carrosserie demeure un secteur de prestige, mais sa rentabilité se réduit de plus en plus sous l'action de la concurrence. La Direction considère malgré tout que c'est la seule "locomotive" capable d'entrainer les autres activités de la Société. Il est donc décidé que DUCO serait présent avec un stand important sur toutes les manifestations de la profession, en particulier les salons AUTO et EQUIP'AUTO, en alternance.

DUCO salon 1979
DUCO salon 1981
Salon 1979
Salon 1981


Il faut de plus organiser pour nos distributeurs de grandes réunions d'information avant de mettre nos nouvelles gammes de peintures sur le marché.

Une équipe comprenant J. JONCKHEERE, J.P BOURRILLON, A. SANTELLI et M. CASCUA va donc s'occuper de ces grands projets que je devrai animer.

 

CANNES - 1983

C'est la première rencontre internationale avec le chansonnier P. DOUGLAS en vedette américaine. C'est l'occasion officiellement de présenter notre nouvelle série: « le MX », avec un gros succès d'estime.

 

SOFITEL-BALARD - 1984 en parallèle avec le Salon de l'Auto.

Le « MX » s'est étoffé en devenant le DUCO-LOGIC-SYSTEME grâce à l'apport d'un mini-ordinateur et d'une balance électronique pour réaliser les teintes. Hélas, il faut dire que la clientèle s'intéresse surtout aux baptêmes de l'air en hélicoptère au-dessus de Paris que nous offrons avec B. BRUNEAUX !


LE CAP D'AGDE - 1985

Deuxième rencontre internationale avec J. AMADOU comme vedette !

La série « MX » a encore été améliorée et complétée, et devient: L'AUTO-LOGIC-SYSTEME. Les démonstrations sont faites par l'équipe technique, A. CESARINI et M. GILET et M. MARTIN du Commercial.

Pour agrémenter ce lancement, DUCO a décidé de participer au « Trophée des circuits automobiles » sur Peugeot 505 Turbo, pilotée par Didier ARTZET. Il fera premier à Magny-Cours et au Castellet et sera vainqueur final au classement général.

Ce fut un beau succès sportif pour nos couleurs !

 

DUCO Cap d'Agde 1985
DUCO peugeot 505
Peugeot 505 Cap d'Agde 1985

AJACCIO - 1986

 
Troisième rencontre internationale dont J. MAILHOT est chargé d'animer le spectacle.

DUCO Ajaccio 1986



Plus sérieusement, J. JONCKHEERE va y faire un exposé complet sur nos nouvelles réalisations techniques: Les peintures nacrées - Les peintures irisées. M. LUNDY quant à lui parlera de l'adaptation de nos gammes au revêtement des matières plastiques.

Le secteur commercial est lui en pleine modernisation dans le domaine de l'informatique avec J. COHEN, assisté de Mmes D. THUAUD et J. POSBEYCKIAN.

Le secteur « Promotion et Publicité » est animé par Kathy BECKERT.

Des « vedettes », pilotes automobile et le couturier A. COURREGES sont même appelées en renfort pour mettre en valeur des véhicules personnalisés par la peinture.

Hélas, malgré tous les efforts techniques et financiers consentis, et cinq cents clients potentiels recensés, le but fixé par la Direction ne sera jamais atteint.


             

  BIARRITZ - Mai 1987

DUCO Beltoise Biarritz 1987  

En compagnie de J.P BELTOISE, nous faisons un bilan des dernières opérations et de quelques succès. M. CASCUA, toujours aussi inventif tente de lancer une ultime idée nouvelle: "L'AUTO-CITY". Il s'agirait, pour le client, de repeindre lui-même son véhicule dans un centre technique de peinture automobile, équipé d'une cabine aux normes internationales, avec l'assistance technique d'un moniteur formé par nos soins. Cela ne se fera j
amais !

Mais cette dernière réunion marque surtout pour moi, la fin de ma carrière chez DUCO, avec l'octroi d'une jolie coupe en souvenir, pour me remercier !


ON LIQUIDE ET ON FERME par R. DUFLOS.

 

C'est la banderole qu'on aurait pu accrocher à la porte de l'usine de Stains en ce début 1989.

  

Liquidation DUCO DUCO fin histoire
 
Après le personnel, tout ce qui pouvait être récupéré avait été transféré à Arpajon: l'ensemble des matières premières et des produits finis utilisables, mais aussi une grande partie du matériel de production, et de quoi meubler les nouveaux laboratoires. Le démantèlement de l'usine devait être total.

Vous dire que cette période m'a été particulièrement pénible à vivre est peu de chose. Détruire jour après jour les archives de soixante années de l'existence de la Société, et donc la mémoire de tous ceux qui l'avaient vécue! Surveiller le travail des ferrailleurs sciant ou découpant au chalumeau, arrachant câbles et tuyauteries était insupportable et pourtant...! On aurait dit des rapaces se disputant les restes d'une carcasse d'animal touché à mort !

J. JONCKHEERE organisa un dernier pot pour son départ en février 89 et me laissa quelques consignes à cette occasion - ses dernières volontés -... chez DUCO !

Il fallait au mieux terminer la liquidation de Stains avec quelques mécaniciens et agents de sécurité, avec Maria ZYGUEL qui restera fidèle au poste jusqu'en mai.

C'est aussi à cette date que s'arrêtera un bien étrange service de taxi. En effet, chaque jour, une voiture effectuait l'aller-retour Stains-Arpajon avec Mmes C. PHALIER, L. PERlÉ, G. SEZER ET L. WARCHOLAK pour leur permettre de continuer à assurer quelques heures de secrétariat !


LE DERNIER ACTE

 
En mai, il reste tant à faire que la Direction m'accorde six mois supplémentaires pour finir de nettoyer le site. On me demande aussi de venir à Arpajon pour assurer la formation technique de quelques collaborateurs de la nouvelle équipe -sans grand succès et sans suite vu le manque d'intérêt évident manifesté par les stagiaires ! Je vais encore aussi faire une dernière visite sur le stand d'exposition à l'extérieur de nos essais de peinture installé dans les Salins du Midi, sur la presqu'île de Giens à Hyères. J'en profite pour ramener les dernières "éprouvettes" par conscience professionnelle et tout le matériel qui servait à leur contrôle sur place. Et je reste, la plupart du temps, seul à Stains où il ne reste ... j'allais écrire plus un chat, ce qui est totalement faux car ce seront eux mes derniers compagnons !
 

DUCO les chats DUCO chat

Il y a d'ailleurs toujours eu des chats dans l'usine. Chaque atelier avait le sien-attitré, pour éviter toute surpopulation de souris dévastatrices. Mais le plus connu fut le « Rouquin », ce jeune matou que M.ROUTIS avait ramené un beau matin dans une boîte à chaussures. Il restait avec les électriciens à l'entrée de l'usine, mais fréquentait assidûment la vieille « Démonstration » où il savait trouver le gîte et le couvert. Fier et indépendant, il disparaissait parfois pendant plusieurs jours, pour revenir couvert de coups de griffes récoltés dans quelque combat de chefs! C'était un vieux guerrier qui, au hasard de ses siestes sur un sac de pigment pouvait se teinter en bleu, en rouge ou en vert !

Au bout d'une douzaine d'années, il partit un jour et personne ne le revit jamais. Un poète a dit: "les oiseaux se cachent pour mourir", les chats aussi, avec une infinie pudeur.

Et l'été passa, l'automne arriva et le mois de novembre! Plus par tradition que par envie, je fis un "pot" de départ à Arpajon, et un peu plus tard, un autre à Stains dans un Labo-Nord dévasté et glacial. Je remercie les "Anciens" qui se sont déplacés pour cette ultime réunion à l'usine.

 

Et le dernier jour arriva. Je fis un tour complet du site,

dans les vieux ateliers éventrés, aux cloisons défoncées, aux vitres brisées.

Tout n'était que ruines! Comme dans un rêve, ou plutôt un cauchemar.

La nuit est tombée depuis longtemps quand je me décide enfin à quitter le Labo-Nord

par cette porte qui sera restée jusqu'au bout une « Entrée Provisoire ».

 

DUCO FIN de Stain 

 

Nous sommes le jeudi 30 novembre 1989 !

 

 



Date de création : 10/10/2014
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Date de mise à jour : 24/03/2020